dimanche 31 août 2014
Carte blanche : RD Congo, le retour des mauvaises habitudes
La révision constitutionnelle au Congo est un débat mal engagé. Elle semble vouloir se faire au profit du pouvoir en place et au détriment des vrais problèmes que pose le texte actuel.
La question d’une éventuelle révision constitutionnelle domine et agite actuellement le débat politique en République démocratique du Congo. Pourtant, à y regarder de plus près, cette question mériterait un débat dépassionné, car la manière dont l’actuelle Constitution a été élaborée puis adoptée, ainsi que certaines de ses dispositions, inviterait plutôt à devoir la réaménager sur certains points.
Pour commencer, la loi sur la nationalité (une et exclusive) ne correspond plus à la réalité socio-démographique actuelle, marquée par les fortes migrations des années 80-90 et par un nombre sans cesse croissant de sujets congolais disposant d’une autre nationalité que celle d’origine. Ainsi, c’est par un simple moratoire (déjà dépassé) qu’il a été mis fin aux nombreuses contestations (postélectorales) de certains élus, depuis les scrutins de 2007, pour cause de “double nationalité” !
Ensuite, on peut citer de nombreux exemples de dispositions saugrenues ou sujettes à caution, et qui font que sur plusieurs plans la gestion du pays se fait dans l’illégalité si l’on s’en tient stricto sensu aux termes de sa Constitution actuelle. C’est notamment le cas de la forme du régime, voulu “semi-présidentiel”, mais qui fonctionne comme un régime présidentiel pur et simple. De même, le type de décentralisation prôné, avec augmentation du nombre de provinces et un mode de saisie de recettes fiscales à la base, s’avère irréaliste et inadapté.
Déjà lors du référendum constitutionnel de 2006, de nombreux acteurs politiques et de la société civile avaient appelé soit au rejet de cette Constitution (considérée comme une sorte de prime aux belligérants ou centrée autour d’une personne et de ses protagonistes de l’époque), soit à l’amender le plus vite possible après la période de transition.
Malheureusement, la manière dont la majorité au pouvoir a lancé ce débat vient fausser la donne. Car au lieu de s’attaquer aux vrais problèmes posés par ladite Constitution, de chercher à améliorer la gouvernance démocratique, ou de renforcer les droits et libertés des citoyens, la majorité semble privilégier sa révision dans le seul sens du renforcement ou de la conservation du pouvoir. Déjà en 2011, une première modification fut hâtivement adoptée par le Congrès : celle-ci renforça les pouvoirs du président de la République et réduisit l’indépendance du pouvoir judiciaire; mais surtout, elle ramena à un seul tour le scrutin de l’élection présidentielle, afin d’éviter que le président sortant ne soit confronté à une coalition de l’opposition regroupée dans un éventuel second tour.
Dans le débat actuel, la majorité semble viser surtout la suppression ou la modification d’une disposition verrouillée dans la Constitution (art. 220) pour permettre à Joseph Kabila de rempiler pour un nombre illimité de mandats présidentiels !
Ce type de débat a cours non seulement en RDC, mais aussi ailleurs en Afrique. Pourquoi alors inscrire dans des constitutions des dispositions verrouillées dont on sait à l’avance qu’on ne les respectera pas ? Au Congo, Mobutu modifiait la Constitution très régulièrement selon les besoins de son pouvoir et presque suivant ses sautes d’humeur; Laurent-Désiré Kabila, père de l’actuel président, gouvernait par décrets, affichant ainsi clairement la nature autocratique de son pouvoir; Joseph Kabila, qui déclare prôner une “révolution de la modernité”, tend à emprunter au mobutisme des pratiques d’un autre temps, mais dissimulées sous les oripeaux d’une démocratie de façade !
Après la fin (quasi simultanée) des “partis uniques” dans les années 90, certains chefs d’Etat africains reviennent donc avec une nouvelle “spécificité” pour s’éterniser au pouvoir au nom d’une soi-disant “volonté” populaire. Il y a bien sûr des pays africains qui ont atteint un point de non-retour en termes de maturité démocratique. Mais au regard de nombreuses pesanteurs et lenteurs qui affectent les trajectoires politiques de nombreux autres pays, l’Afrique a encore un long chemin à parcourir vers la démocratie, la RDC donnant souvent à cet effet l’exemple parfait de ce qu’il ne faudrait pas faire.
Dieudonné Wamu Oyatambwe
NON, NON et NON pour le transfert des rebelles rwandais de FDLR à Kisangani
Les Forces vives de la Province Orientale et les députés tant nationaux que provinciaux sont unanimes pour refuser le transfert des rebelles rwandais, coupables des atrocités graves et de pillage des ressources naturelles de la RD Congo.
Nous disons NON, NON, et NON à ce complot ourdi contre la population boyomaise ! Nous attendons de la part du gouverneur de la province orientale, M. BAMANISA SAIDI, de transmettre le refus de ses administrés à son hiérarchie et à la communauté internationale.
Il est très danger pour la province orientale, donc de la République, de mettre en danger la vie de nos compatriotes habitants dans cette province. En effet, ni l'Etat central ni la communauté international n'ont aidé la province pour se débarrasser des MBORORO, LRA, ... et toutes forces négatives nationales et étrangères !
Gouverner, c'est prévoir !
samedi 30 août 2014
vendredi 22 août 2014
lundi 18 août 2014
dimanche 17 août 2014
LIBRE OPINION / Révision de la Constitution : le peuple méprisé !
Jean Bosco Kongolo
Les Congolais qui s’intéressent à la politique,
de même que ceux qui ne font que la subir sont tous concernés par le débat qui
se déroule depuis quelques temps au sujet de la révision ou non de la Constitution
avant l’élection présidentielle prévue pour 2016.
Déjà deux camps se sont formés, l’un en faveur de la
révision incontournable et l’autre pour le strict respect des dispositions
dites verrouillées. Politiciens et juristes des deux camps ne cessent de
s’affronter, y compris sur le plan scientifique (cas des professeurs Boshab et
André Mbata) tandis que l’encre et la salive continuent de couler, faisant
craindre le pire aux observateurs avertis. Comme toujours, tous parlent
au nom de la démocratie et surtout du peuple et sont déterminés à aller
jusqu’au bout pour faire triompher leurs opinions. Après tout ce que nous avons
déjà pu entendre, nous avons décidé de donner notre voix pour exprimer
patriotiquement notre propre opinion en répondant aux questions
suivantes : « Quelle est la raison d’être de la Constitution en vigueur?
Contient-elle des dispositions intouchables? Le peuple est-il pris en
considération? »
1. La raison d’être de la Constitution en vigueur
1. La raison d’être de la Constitution en vigueur
Le débat sur la révision ou non de la constitution ne susciterait pas
autant de passion et d’animosité si l’on se donnait la peine de lire et de
relire correctement cette loi fondamentale et de la respecter.
A entendre les thèses des révisionnistes, on a
l’impression que cette constitution a été imposée au peuple congolais par des
étrangers ou par des extraterrestres alors que c’est d’elle qu’émane « la
légitimité » du pouvoir dont ils se prévalent. Or, il suffirait de lire
attentivement l’exposé des motifs, indissociable de la Constitution dont elle
est partie intégrante (tout juriste de bonne formation le sait), pour
comprendre sa raison d’être. Voici un extrait de cet exposé des motifs :
« Depuis son indépendance en 1960, la République Démocratique du Congo
est confrontée à des crises politiques récurrentes dont l’une des causes
fondamentales est la contestation de la légitimité des institutions et de leurs
animateurs. Cette contestation a pris un relief particulier avec les
guerres qui ont déchiré le pays de 1996 à 2003.
En vue de mettre fin à cette crise chronique de
légitimité et de donner au pays toutes les chances de se reconstruire, les
délégués de la classe politique et de la Société civile, forces vives de la
Nation, réunis en dialogue intercongolais, ont convenu, dans l’Accord Global et
Inclusif signé à Pretoria en Afrique du Sud le 17 décembre 2002, de mettre en
place un nouvel ordre politique, fondé sur une nouvelle Constitution
démocratique sur la base de laquelle le peuple congolais puisse choisir
souverainement ses dirigeants, au terme des élections libres, pluralistes,
démocratiques, transparentes et crédibles.
A l’effet de
matérialiser la volonté politique ainsi exprimée par les participants au
Dialogue intercongolais, le Sénat, issu de l’accord Global et Inclusif précité,
a déposé, conformément à l’article 104 de la Constitution de la transition, un
avant-projet de la nouvelle Constitution à l’Assemblée nationale qui l’a adoptée sous forme de projet soumis au référendum
populaire. »
Il est clair que la
principale raison d’être de cette Constitution était de mettre fin aux crises
politiques récurrentes qui ont émaillé l’histoire de notre pays depuis 1960.
D’où vient alors que cette Constitution tant vantée à l’époque est aujourd’hui
jugée non adaptée par ceux-là mêmes qui en tirent bénéfice depuis bientôt dix
ans? Peuvent-ils avoir le courage d’avouer, la main sur le cœur, que
cette Constitution n’a pas réussi à mettre fin aux crises de légitimité et
pourquoi? Plus loin, le même texte de l’exposé des motifs nous renseigne
tout aussi clairement sur les préoccupations majeures qui président à
l’organisation et à l’exercice du pouvoir issu des nouvelles institutions :
« Les nouvelles
Institutions de la République Démocratique du Congo sont: le Président de la
République;
- le Parlement;
- le Gouvernement;
- les Cours et
Tribunaux.
Les préoccupations
majeures qui président à l’organisation de ces Institutions sont les suivantes:
1. assurer le fonctionnement
harmonieux des Institutions de l’État;
2. éviter les
conflits;
3. instaurer un État
de droit;
4. contrer toute tentative
de dérive dictatoriale;
5. garantir la bonne
gouvernance ;
6. lutter contre
l’impunité;
7. assurer
l’alternance démocratique.
C’est pourquoi, non seulement le mandat du Président
de la République n’est renouvelable qu’une seule fois, mais aussi, il exerce
ses prérogatives de garant de la Constitution, de l’indépendance nationale, de
l’intégrité territoriale, de la souveraineté nationale, du respect des Accords
et traités internationaux ainsi que celles de régulateur et d’arbitre du bon
fonctionnement des Institutions de la République avec l’implication du
Gouvernement sous le contrôle du Parlement. »
Sauf s’il y a mille façons de lire et de comprendre un texte, celui-ci a
été rédigé pour s’appliquer indistinctement et de façon impersonnelle à tout
Congolais élu président et à qui incombe la tâche d’en être le garant durant
son mandat, renouvelable une seule fois. Il est vrai que
toute Constitution est modifiable en tant qu’œuvre humaine, mais la
méthode utilisée ainsi que le choix sélectif des articles à modifier fait
douter de la noblesse et de la transparence de l’objectif poursuivi par les
partisans de la modification.
1.1. Méthode utilisée : la rumeur et le démenti
Excepté dans un régime à parti unique, partout où l’alternance au
pouvoir est intégrée dans la culture politique, peu importe si le président
sortant a réussi ou non son mandat et peu importe également son jeune âge, la
loi fondamentale est appliquée sans atermoiements. Le parti au pouvoir
s’organise à l’interne et sans ambigüité pour désigner un successeur valable et
capable non seulement de conserver ce pouvoir, c’est légitime, mais aussi
d’assurer la continuité ou l’amélioration du projet de société à présenter aux
électeurs.
En RDC, malgré que
Joseph Kabila épuise bientôt ses deux mandats prévus par la Constitution, il
est curieux que le PPRD et alliés soient incapables de lui trouver un
successeur parmi tant de « cadres » et chefs des partis politiques. Est-ce par
déficit d’ambitions et de leadership ou par incompétence? Comme dans un jeu
d’adultère, ce qui n’était qu’une vulgaire et banale rumeur a fini par être annoncée par ceux-là même qui
en apportaient le démenti cinglant en soutenant du bout des lèvres que le Chef
de l’État était démocrate, garant de la Constitution et respectueux des lois de
la République.
Le 18 mars 2013, Claude Mashala a pris tout le monde
de court. Alors que la classe politique congolaise ergotait depuis des semaines
sur la révision, ou non, de l’article 220 de la Constitution qui empêche Joseph
Kabila de briguer un troisième mandat, le secrétaire national du Parti du
peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD, principal parti de la
majorité) a décidé de lancer une pétition pour changer de Constitution.
Depuis quelques mois pourtant, le camp présidentiel tente de rassurer l’opposition politique sur l’intention du chef de l’État de respecter les dispositions constitutionnelles.
Au lendemain des «concertations nationales» tenues à
Kinshasa début septembre, Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale et
chef de la Majorité présidentielle (MP), assurait encore à Jeune Afrique que
«[Joseph Kabila] est le garant de la Constitution, il la respectera et la fera
toujours respecter».
Plus récemment sur
RFI, Lambert Mende, porte-parole du gouvernement et membre du bureau exécutif
de la MP, abondait dans le même sens : «Joseph Kabila nous a dit qu’en 2016, il
y aura un passage de flambeau civilisé entre un président qui sort et un
président qui entre. » (Source : Jeune Afrique du 21 mars 2014. :http://www.jeuneafrique.com /Article/ARTJAWEB 20140320182838/)
1.2. Absence de transparence:
1.2. Absence de transparence:
La deuxième sortie sur le sujet du référendum
est signé Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale et secrétaire
exécutif de la majorité présidentielle.
Dans une longue déclaration à la presse, enregistrée
le 17 juillet et relayée dans les médias le 21 juillet, Minaku revient sur les
deux possibilités offertes par la Constitution pour sa modification : le vote
du Congrès (Sénat et Assemblée nationale en se basant sur l’article 218) et…le
référendum.
Le président de l’Assemblée enfonce même le clou en
affirmant que sa majorité tenait à conserver le pouvoir. Prenant soin de
spécifier : « bien évidemment selon le standard international de toute
démocratie. »(Source : Afrikarabia du 22
juillet 2014) http://afrikarabia.com/wordpress/rdc-lidee-dun-referendum-fait-son-chemin/) « Nous avons déclaré de manière très claire aux participants que nous
ne reconnaissons ni à un Gouvernement ami ni à des ONG, ni à nos
collègues de l’opposition le droit d’interdire aux Congolais ce que leur
Constitution autorise.
Aucune fraction du peuple n’a le droit de se
substituer au peuple. Et, s’agissant de l’article 220, il n’est pas interdit
aux Congolais d’en débattre, étant entendu qu’en démocratie, il n’existe pas de
sujets tabous », a encore insisté Mende. » (Source : Le Potentiel online, mise à jour du 8 août 2014) http://www.lepotentielonline.com/index.php?option=com_content&view=article&id=9709:lambert-mende-criminaliser-toute-revision-constitutionnelle-est-un-non-sens&catid=90:online-depeches&Itemid=472)
De quoi dérouter tout esprit cartésien et se poser des questions sur le sens de l’honneur, de dignité et de respect de la parole donnée de ceux qui nous gouvernent. Face au silence inquiétant du Chef de l’État lui-même, garant de la Constitution et du bon fonctionnement des institutions, il y a aussi de quoi se demander si tous ces messieurs qui parlent « en son nom » sans un démenti de sa part sont ses ballons d’essai ou simplement des profiteurs agissant pour leur intérêt et qui le poussent à la faute, craignant de perdre les privilèges acquis. La réponse est facile à trouver dans l’agitation qui règne déjà au sein de leur famille politique où, contrairement aux lois de la jungle, des loups (pas des moindres) commencent à se manger entre eux avec une telle avidité que les agneaux observent le spectacle sans rien y comprendre : «
De quoi dérouter tout esprit cartésien et se poser des questions sur le sens de l’honneur, de dignité et de respect de la parole donnée de ceux qui nous gouvernent. Face au silence inquiétant du Chef de l’État lui-même, garant de la Constitution et du bon fonctionnement des institutions, il y a aussi de quoi se demander si tous ces messieurs qui parlent « en son nom » sans un démenti de sa part sont ses ballons d’essai ou simplement des profiteurs agissant pour leur intérêt et qui le poussent à la faute, craignant de perdre les privilèges acquis. La réponse est facile à trouver dans l’agitation qui règne déjà au sein de leur famille politique où, contrairement aux lois de la jungle, des loups (pas des moindres) commencent à se manger entre eux avec une telle avidité que les agneaux observent le spectacle sans rien y comprendre : «
J’espère, Madame, que
vous ne recommandez pas de commencer à arrêter les gens parce qu’ils écrivent ‘’Kabila, totondi yo nainu te,
Kabila, mposa nayo esili te’’. Vous n’avez jamais entendu une telle
position des Instances officielles de la Majorité. La Majorité vous dit des
choses; le Gouvernement vous dit des choses; le Président vous dit des choses
et vous allez chercher le point de vue obscur d’un obscur cadre de la Majorité.
» (Propos tenus par le Ministre L.Mende dans sa conférence de presse du 3
juillet 2014). (Source; Le potentiel du 4 juillet 2014 : http://www.lepotentielonline.com/index.php?option =com_content & view=
article&id=9573:la-gueguerre-kin-kiey-mulumba-mende-omalanga-un-signe-qui-ne-trompe-pas-sur-la-mp&catid=85:a-la-une&Itemid=472).
En réplique à ces
propos, le ministre Kin Kiey a porté plainte contre son collègue auprès du
président de l’Assemblée nationale, en tant que Secrétaire exécutif de la
Majorité présidentielle, avec copies pour information à plusieurs autorités
politiques, judiciaires et de sécurité. En voici l’extrait :
« Est-il interdit à un élu-un Réélu de la manière la
plus honnête et la plus transparente-dont la circonscription et la province-ont
le plus et le mieux élu le Président de la République (à plus de 74% en 2011)
de faire montre de sa passion et de sa ferveur personnelles pour Joseph Kabila
Kabange, encore qu’il n’engage nullement dans sa campagne la Majorité
Présidentielle? Au fond, qu’est-ce qu’on veut dire « cadre obscur » en
Lexicologie, totalement vide de sens? Est-il permis à un « porte-parole »
d’houspiller un collègue, de porter un jugement de valeur sur des prises de
position personnelles d’un collègue?
Le ministre en charge de la Nouvelle Citoyenneté ne
met-il pas à mal la nécessaire cohésion gouvernementale? » (Source :
idem.) Comme on peut aisément le constater, de la
rumeur aux déclarations de plus en plus non équivoques, les révisionnistes
s’abstiennent de dire pourquoi ils laissent tranquilles certaines autres
dispositions utiles de la Constitution qui n’ont jamais connu un moindre
début d’application, pour ne s’attaquer qu’à celles verrouillées.
C’est le cas de
l’article 2, relatif au découpage territorial, qui crée inutilement des
provincettes non viables économiquement, sources prévisibles de conflits ethniques
et tribaux, qui risquent de fragiliser davantage l’unité et la cohésion
nationales. Leur seule préoccupation, c’est conserver le pouvoir pour le
pouvoir, peu importe ce que dit la Constitution dont ils avaient vanté les
vertus démocratiques.
2. Article 220 de la Constitution :
Disposition
intouchable « La forme
républicaine de l’État, le principe du suffrage universel, la forme
représentative du Gouvernement, le nombre et la durée des mandats du Président
de la République, l’indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme
politique, et syndical, ne peuvent faire l’objet d’aucune révision
constitutionnelle.
Est formellement interdite toute révision
constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne ou de réduire les
prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées. »
Pour comprendre facilement le contenu et la philosophie qui le
sous-tendent, cet article ressemble étrangement au « fruit interdit » du Jardin
d’Éden, qu’Adam et Ève avaient consommé sur instigation de Lucifer et dont les
conséquences, en termes de calamités (maladie, souffrance, mort), poursuivent
jusqu’à ce jour toute l’espèce humaine. La métaphore se rapporte parfaitement
bien à la situation qui prévaut actuellement en RDC.
Concrètement, le
pouvoir constituant ne laisse aucune place à une quelconque interprétation ni
dérogation pour tout ce qui touche au nombre et à la durée des mandats du
Président de la République, de même que pour l’indépendance du pouvoir
judiciaire, le pluralisme politique et syndical (al.1er de l’art.220). La
raison d’être de cette rigidité est contenue dans l’exposé des motifs dont nous
reprenons encore l’extrait déjà évoqué :
« Les préoccupations majeures (c’est nous qui
soulignons) qui président à l’organisation de ces Institutions sont les
suivantes :
1.
assurer le fonctionnement harmonieux des Institutions de l’État;
2.
éviter les conflits;
3.
instaurer un État de droit;
4.
contrer toute tentative de dérive
dictatoriale;
5.
garantir la bonne gouvernance ;
6.
lutter contre l’impunité;
7.
assurer l’alternance démocratique.
C’est pourquoi, non
seulement le mandat du Président de la République n’est renouvelable qu’une seule fois, mais aussi, il exerce ses
prérogatives de garant de la Constitution, de l’indépendance nationale, de
l’intégrité territoriale, de la souveraineté nationale, du respect des accords
et traités internationaux ainsi que celles de régulateur et d’arbitre du
fonctionnement normal des Institutions de la République avec l’implication du
Gouvernement sous le contrôle du Parlement. »
Persister à modifier cet article pour imposer un
troisième mandat du Président Kabila équivaut à réintroduire les conflits et le
dysfonctionnement des Institutions, à mettre une croix sur l’État de droit, à
réinstaurer la dictature, à sublimer la mauvaise gouvernance, à tolérer
l’impunité ainsi qu’à résister à l’alternance démocratique.
C’était pareil avec le Président Mobutu, dont le culte
de la personnalité et le règne à durée indéterminée avaient été l’œuvre des
individus zélés parmi lesquels plusieurs sont encore et toujours actifs dans
les institutions dites démocratiques.
Voilà ce à quoi des
politiciens égoïstes et certains professeurs de la nouvelle génération des
constitutionnalistes congolais veulent de nouveau entraîner tout le peuple.
C’est comme si ces derniers n’avaient pas été avec nous, à la même époque, dans
la même bonne école des éminents Lihau, Vundwawe, Djelo… ou qu’en dehors des enseignements que tous nous recevions le
jour, la nuit eux allaient apprendre autre chose en prévision de la « Troisième
République », qu’ils considèrent comme leur propriété privée.
Comme si cela ne suffisait pas, des prélats, plus visibles au Palais du Peuple qu’à l’église, sont mis à contribution pour désorienter leurs ouailles avec des déclarations sophistes: « Le chef de l’Église du Christ au Congo (ECC) est favorable à la révision des articles ‘’verrouillés’’ de la Constitution de la RDC. Mgr Marini Bodho s’est exprimé mercredi 6 août 2014 à Kinshasa lors de l’ouverture du synode national de cette confession religieuse. Cette réunion a notamment pour objectif d’examiner les amendements des textes légaux pour donner des nouvelles orientations à cette église :
Comme si cela ne suffisait pas, des prélats, plus visibles au Palais du Peuple qu’à l’église, sont mis à contribution pour désorienter leurs ouailles avec des déclarations sophistes: « Le chef de l’Église du Christ au Congo (ECC) est favorable à la révision des articles ‘’verrouillés’’ de la Constitution de la RDC. Mgr Marini Bodho s’est exprimé mercredi 6 août 2014 à Kinshasa lors de l’ouverture du synode national de cette confession religieuse. Cette réunion a notamment pour objectif d’examiner les amendements des textes légaux pour donner des nouvelles orientations à cette église :
« Parfois on parle de
certains articles qui sont bloqués, on ne peut pas les toucher. Mais là, nous
sommes en train de museler la population qui est souveraine. Acceptons notre
faiblesse. Ne pas bloquer le développement d’une société qui évolue » Il
soutient que cette Constitution est susceptible de subir de modification au vu
de l’évolution nationale. Pour lui, seule la bible ne peut subir de
modification.» (Source : Télé 50 du
7 août 2014 :http://www.tele50.com/fr/index.php/rdcongo/item/973-rdc-mgr-marini-bodho-favorable-a-la-revision-de-la-constitution)
Mais cette fois-ci, curieusement, on n’a entendu
aucun reproche du gouvernement ou d’un personnage s’exprimant en son nom pour
rappeler au prélat de faire la part des choses entre ce qui appartient à Dieu
et ce qui revient à César.
De l’inanition de la nation au musèlement de la population, il n’y
a aucun doute sur l’identité de vues et d’intérêts de ces personnages qui
s’apprêtent à abuser du peuple, pauvre peuple.
3. Le peuple est-il pris en considération?
Faisant table rase du régime déchu de la deuxième République, le nouveau
pouvoir constituant avait décidé d’impliquer le peuple en soumettant à son
approbation le projet de Constitution voté par le Parlement de transition.
Malgré les
irrégularités qui avaient entaché le référendum, les résultats de celui-ci
n’ont jamais été remis en cause. C’est donc ce même souverain primaire qu’on
veut désabuser alors qu’il avait déjà levé les options fondamentales non
négociables, au nombre de 7, énumérées dans l’exposé des motifs dont nous avons
repris un extrait et parmi lesquelles le nombre et la durée des mandats du
Président de la République. La preuve du caractère non négociable de toutes ces
options fondamentales a d’ailleurs été réaffirmée dans l’exposé des motifs
de la Constitution révisée peu avant les élections décriées de 2011 : Loi no
11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République
Démocratique du Congo du 18 février 2006
Exposé des motifs :
« Depuis l’entrée en
vigueur, le 18 février 2006, de la Constitution de la République Démocratique
du Congo, le fonctionnement des institutions politiques tant centrales que
provinciales a fait apparaître des situations concrètes, des contraintes et des
problèmes non prévus par le constituant originaire.
En effet, d’une part,
certaines dispositions se sont révélées handicapantes et inadaptées aux
réalités politiques et socioéconomiques de la République Démocratique du Congo.
D’autre part, des dysfonctionnements imprévus par le constituant originaire
dans la vie des institutions de la République tant au niveau national que
provincial.
La présente loi a
pour finalité de donner des réponses adéquates aux problèmes posés aux
institutions de la République depuis le début de la première législature de la
IIIème République afin d’assurer le fonctionnement régulier de l’État et de la
jeune démocratie congolaise.
Dès lors, il ne
s’agit pas de procéder à un ajustement constitutionnel qui remettrait en cause
les options fondamentales levées par le constituant originaire, notamment en
matière d’organisation du pouvoir d’État et de l’espace territorial de la
République Démocratique du Congo. »
Faut-il donc permettre qu’à l’échéance de chaque
mandat l’on prenne tout un peuple en otage pour lui dire que telle disposition
de la constitution ne convient plus et qu’il faille la réviser pour l’adapter à
l’évolution du moment? Quand bien même tel pourrait être le cas, pourquoi ce ne
sont que les mêmes qui peuvent procéder à ce genre de révision?
La vérité, c’est qu’en proposant de consulter le
peuple pour une matière que ce même peuple a déjà retenue comme non négociable,
les révisionnistes comptent à la fois sur son ignorance et sur la force. En
effet, le ministère de l’intérieur et tous les partis politiques, toutes
tendances confondues, ne se sont jamais donné la peine d’assurer l’éducation
civique de la population en vulgarisant la Constitution dans toutes les langues
nationales auprès de toutes les couches de la population.
De quel peuple parle-t-on pour comprendre les notions
de crise institutionnelle,
d’État de droit, d’alternance au pouvoir, de légitimité politique…pendant que
même des professeurs de Droit, des députés et des diplômés d’université lisent
le texte de la Constitution en songeant plus à leurs comptes en banque
qu’aux préoccupations quotidiennes de ce peuple, en majorité illettré?
Conclusion
La population congolaise, dans sa grande majorité, garde encore des séquelles de la dictature mobutienne comme des plaies non encore cicatrisées et d’ailleurs rouvertes par les guerres lui imposées par le conglomérat des aventuriers dénommés AFDL, selon les propos de L.Désiré Kabila, et les pays voisins de l’Est. Elle n’a pour le moment besoin que de la paix pour travailler et se sentir mieux chez soi.
La population congolaise, dans sa grande majorité, garde encore des séquelles de la dictature mobutienne comme des plaies non encore cicatrisées et d’ailleurs rouvertes par les guerres lui imposées par le conglomérat des aventuriers dénommés AFDL, selon les propos de L.Désiré Kabila, et les pays voisins de l’Est. Elle n’a pour le moment besoin que de la paix pour travailler et se sentir mieux chez soi.
Tirant les leçons du passé, elle s’était déjà exprimée
une fois pour toutes sur les causes de ses malheurs que sont notamment la
confiscation du pouvoir par un individu ou un groupe d’individus, les conflits
consécutifs aux crises de légitimité, l’absence d’État de droit et d’alternance
démocratique, l’impunité et la mauvaise gouvernance. C’est tout ceci qui avait
inspiré au pouvoir constituant de 2006 la rédaction et le libellé de l’article
64 de la Constitution, qui dispose : « Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui
prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de
la présente Constitution. Toute tentative de renversement du régime
constitutionnel constitue une infraction imprescriptible contre la nation et
l’État. Elle est punie conformément à la loi. »
Plutôt que de s’acharner à renverser le régime
constitutionnel en poussant le Chef de l’État à consommer le fruit interdit,
avec tout le lot de calamités sociopolitiques et de crises de légitimité que
cela risquerait d’entraîner pour longtemps, le PPRD et ses alliés
donneraient à la nation et au monde entier un bon exemple de démocratie en
organisant d’abord une alternance à l’interne et en encourageant par conséquent
leurs cadres à exprimer légitimement leurs ambitions pour le pouvoir suprême.
A moins qu’ils nous
convainquent du contraire, des cadres comme Boshab, Minaku, Mende,
Katumbi, Marini Bodho, Mwando Simba, Pierre Lumbi, Bongeli, Henri Thomas
Lokondo, Bahati Lukwebo…devraient avoir une telle ambition pour affronter dans
la transparence et à armes égales leurs homologues de l’opposition devant
l’arbitre souverain qu’est le peuple. C’est ça la démocratie.
Par Jean-Bosco Kongolo M.
Juriste& Criminologue_
Le Phare de 18 aout 2014
vendredi 15 août 2014
À propos du Message de la CENCO : « Protégeons notre Nation » ET SI LES ÉVÊQUES AVAIENT RAISON ?
Louis Basinga Bweng'aa Ngelesa
« Une vérité nue est toujours meilleure qu’un mensonge habillé »
« Une vérité nue est toujours meilleure qu’un mensonge habillé »
(Ann Landers, rédactrice et journaliste américaine)
Chère Lisago, avant d’amorcer ma réflexion sur le dernier « Protégeons notre Nation » de la CENCO aux Congolais (http://www.cenco.cd/?id_art=106), je remercie tout particulièrement le frère Théo Baelo pour sa brillante analyse y relative, nourrie d’éléments amplement probants et susceptibles d’éclairer la lanterne des uns et des autres dans notre quête de vérité concernant l’épineuse question de la révision constitutionnelle en RDC. De même que le frère Albert R. Teuwen que je remercierai vers la conclusion de mon intervention. À l’opposé, je suis resté sidéré et confus face aux réactions à fleur de peau, hâtives et tendancieuses, de la part de certains frères qui s’évertuent à tordre sciemment la réalité autour des affirmations gratuites et des propos outrageux envers les Évêques et l’Église catholique. Ce qui laisse à penser que le but inavoué de ce genre d’automatismes est non seulement de prêcher pour son saint, mais également de récriminer, d’invectiver et de nuire à autrui. Comment arrive-t-on si facilement à qualifier le message des Évêques de « procès d’intention », de « jet illico presto de l’anathème » et à leur attribuer la paternité d’un sacrement imaginaire et étranger à l’Église catholique (absolution par anticipation), sans fournir la moindre preuve de ces allégations ? Est-ce honnêtement possible ? François Rabelais doit se retourner mille et une fois dans sa tombe : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » !
Procès d’intention ou interpellation ?
D’emblée, je trouve inapproprié le fait d’assimiler le Prêtre catholique aux Pasteurs des autres chrétientés, à l’Imam et au Rabbin. Tout comme celui de vouloir mettre toutes les pratiques religieuses ou toutes les religions dans un même sac. Cela m’est plus qu’imprudent et difficilement soutenable. Nous croyons peut-être tous en un Dieu unique et vrai. Cependant, le credo, les rites et les conceptions du réel divergent nettement les uns des autres. Le fossé qui nous sépare est tellement de taille que l’on se lance dans des hypothèses aussi hasardeuses. Quant au prétendu « jet illico presto de l’anathème » des Évêques, qui justifierait leur « procès d’intention » contre le Pouvoir, et au « 8ème sacrement catholique » (absolution par anticipation) institué ou, mieux, inventé par la CENCO, c’est encore aller un peu trop vite en besogne. Sachons qu’en Église, le terme anathème implique une excommunication majeure prononcée contre les hérétiques ou les ennemis de la foi catholique. Il symbolise aussi la personne frappée de cette excommunication. Dans le langage courant, il signifie condamnation, malédiction, réprobation énergique et publique, blâme sévère visant une personne, ses actes ou ses opinions. Ainsi compris, le message de la CENCO reflète-t-il ces deux images ? Les Évêques ont-ils jeté l’anathème sur nos dirigeants politiques ? Les ont-ils condamnés, maudits ou blâmés ? Évidemment que non. Pour trois raisons. D’abord, la plupart de nos gouvernants se foutent ordinairement de l’Église et n’appliquent même pas les préceptes du message divin dans leur vie. Impossible donc d’anathématiser ou d’excommunier des personnes n’appartenant ni à la hiérarchie catholique ni à la communauté des fidèles. Ensuite, je n’imagine pas un seul instant les Évêques, hommes hautement pondérés, savamment réfléchis et habilement avertis, se servir d’une tribune publique pour « régler des comptes » au Pouvoir. Sinon, que gagneraient-ils en le faisant ? Dans son message enfin, la CENCO n’affirme nulle part que la Majorité présidentielle (MP) veut ou va modifier la Constitution pour se maintenir au pouvoir. Mais elle l’exhorte simplement à l’observer à la lettre, tel que voulu par le peuple congolais, et de ne pas envisager son éventuelle modification en ce moment, ce qui ne serait pas sans risque pour la paix sociale. Il s’agit là d’une interpellation, d’une exhortation ou d’un appel à la raison, complètement différents d’une attaque, d’un blâme ou d’une condamnation. Manifestement, les accusations portées contre les Évêques se révèlent comme des aberrations toutes pures, qui prouvent à suffisance que c’est plutôt à ces derniers qu’on prête des intentions malveillantes, pour des mobiles toujours à élucider. Il en ressort que le problème des détracteurs de la CENCO se trouve donc ailleurs. Car leur désamour endémique et leur haine viscérale contre les Évêques ne se fondent pas objectivement. À mon humble avis, cette attitude n’est ni positive, ni intellectuelle, ni tout simplement humaine. Surtout qu’ils s’acharnent abusivement et inutilement aux personnes qui ne peuvent jamais leur répondre en raison de leurs responsabilités et charges pastorales.
Le rôle de l’Église
À mon sens, une certaine clarification s’impose à ce niveau. Notons que l’Église catholique n’a jamais été, n’est pas, ni ne sera en guerre contre l’État congolais ou ses régimes politiques successifs. Cela n’est pas son rôle, son objectif ou sa mission. Elle n’est pas un adversaire du Gouvernement ni un parti politique de l’opposition. Ni non plus un parti membre de la MP pour faire allégeance à son autorité morale. Moins encore une société civile au sens strict du terme. Totalement différente de ces institutions sociétales qu’elle respecte naturellement, elle est une organisation propre, détenant un dessein unique en son genre, parce qu’elle reste d’abord une institution divine, voulue et fondée par le Christ lui-même qui a confié aux Évêques, continuateurs ou successeurs des Apôtres, la charge « d’enseigner, de sanctifier et de gouverner » le peuple de Dieu. Cette charge apostolique fait des Évêques « des témoins du Christ devant tous les hommes ». Y compris nos gouvernants ! Leur mission prophétique consistant à montrer le chemin du salut aux humains afin que ceux-ci se conduisent dans la sainteté de vie selon l’esprit de Dieu, puisque « le fruit de l’Esprit consiste en effet dans toute forme de bonté, de justice et de vérité » (Ép. 5, 9). Dès lors, l’Église catholique demeure toujours aux côtés de l’homme, attentive à l’homme intégral, « à tout homme et à tout l’homme » (Pape Paul VI), à toutes les dimensions liées à sa vie en société. Aussi bien spirituellement, physiquement que socialement. À ce titre, elle ne peut rester indifférente face à tout pouvoir politique ou économique excessif, qui abuse allégrement du peuple de Dieu, du destin d’une Nation ou qui ne se conduit pas selon le dessein de Dieu.
Cela dit, nos Pasteurs sont-ils tous des saints ? Des irréprochables ? Ce n’est pas ce que j’affirme ici parce que seul Dieu est parfait. Il est vrai que l’on retrouve aussi des hommes et des femmes pas toujours catholiques parmi nos Évêques, Prêtres, Religieux et Religieuses. C’est donc une bien triste réalité que nous vivons souvent en Église. Heureusement que « l’absurdité de l’exception confirme la pertinence et la raison d’être de la règle ». Nos Pasteurs étant les gardiens ou les dépositaires de la Parole de Dieu, celle-ci leur est destinée en premier lieu, de manière particulière. À eux d’abord qui ont la charge de la proclamer au monde et de l’annoncer aux autres hommes, sur qui ils exercent l’autorité morale et spirituelle de l’Église, et indirectement celle de Dieu… Vu ce rôle prépondérant qui est le leur, ils sont naturellement appelés à se distinguer dans la fidélité chrétienne, en suivant le Christ « dans le témoignage d’une vie qui corresponde au don de grâce du Baptême et de l’Ordination » (Pape François), en essayant au possible de prêcher d’exemple par leur dire et faire, sans jamais servir deux maîtres à la fois, ni se réfugier dans le dire et laisser-faire ou dans l’hypocrisie. Car, aussi bien leur témoignage chrétien que leur contre-témoignage influent largement sur les fidèles et l’ensemble du peuple de Dieu. Positivement ou négativement. De cette manière, ils sont également concernés par leurs propres enseignements. Étant donc tous des pécheurs, l’Église nous recommande, Pasteurs et fidèles, de reconnaître nos péchés et de les confesser sincèrement, afin de poursuivre résolument notre marche sur le chemin de la vérité qui conduit à la sainteté. D’où, nos remises en question perpétuelles pour des élans nouveaux…
Pour autant, ce qui vient d’être dit n’enlève rien au caractère « saint » de l’Église. Bien au contraire. Il n’est d’ailleurs pas moins vrai que l’Église catholique demeure l’une de nos rares références congolaises de toujours, sinon la meilleure dans l’absolu. En effet, dans un monde de plus en plus sécularisé comme le nôtre, où le bien et le mal, la vérité et le mensonge, le vrai et le faux, les valeurs et les antivaleurs s’entremêlent indistinctement, au gré des vagues et des intérêts égoïstes, l’Église reste la seule véritable lampe qui éclaire la société par la lumière vivifiante de l’Évangile du Christ qu’elle porte en elle. Aussi, est-elle appelée à défendre la veuve et l’orphelin, c’est-à-dire à préserver les êtres faibles et les opprimés. Mais, si cette lumière devient défaillante, cela pose un réel problème car c’est toute la société qui se perd, faute de boussole. C’est ainsi que, de par leur pouvoir sacré reçu du Seigneur, nos Pères dans la foi attirent l’attention, alertent ou avertissent des phénomènes sociétaux anormaux, des différentes situations critiques et des dangers divers. Ils dénoncent aussi, en toute indépendance d’esprit, les racines des maux qui dénaturent et avilissent l’homme, dont notamment l’argent, le pouvoir et la manipulation. De ce fait, considérés comme gênants et subversifs, ils sont souvent mal compris, détestés, combattus et diabolisés à outrance par les puissants, les hommes forts et leurs officines politiques et intellectuelles, inondées également des gens (vrais faux chrétiens ?) se réclamant même de l’Église catholique, mais qui vivent tout le contraire des exigences d’une catholicité responsable, c’est-à-dire des personnes ne gardant de catholique que le nom et le souvenir hérités de leur lointain baptême relégué aux oubliettes de l’histoire. D’où, chaque prise de position officielle de la hiérarchie catholique, surtout dans le domaine sociopolitique du pays, suscite une levée de boucliers hors pair. Aujourd’hui par exemple, suite à son dernier « Protégeons notre Nation » aux Congolais, la CENCO fait l’objet d’une foudre implacable du régime, via les médias d’État et l’ensemble de la presse acquise au Pouvoir. Que d’âneries, diatribes et états d’âme diffusés à longueur des journées, sans déontologie ni professionnalisme recommandés. Des extravagances inouïes donc, dignes d’une presse aux ordres. De quoi ressusciter Mobutu, le mobutisme et le MPR Parti-État !
Le pouvoir à tout prix
De mon point de vue, il est surprenant qu’une exhortation pastorale suscite un tel déferlement de haine de lapresse congolaise et le courroux de ceux qui se disent des artisans de paix, de justice, de démocratie, de progrès et de modernité en RDC, d’autant plus que la CENCO n’y fait que l’éloge de ces mêmes valeurs, en demandant à tous de les respecter. Concernant d’ailleurs ce débat congolais du siècle (révision constitutionnelle), le décor planté par la MP donne largement raison aux Évêques. L’on y enregistre des gestes forts et des signaux annonciateurs, habillés bien sûr d’ingénieuses tactiques de diversion, qui ne trompent personne, sauf les plus naïfs d’entre nous. Rappelons-en quelques faits saillants :
1) Dans son livre intitulé « Entre la Révision de la Constitution et l’Inanition de la Nation », paru en juin 2013, M. Évariste Boshab (Secrétaire Général du PPRD) en avait donné le ton, en jaugeant l’opinion tant nationale qu’internationale en guise d’un premier ballon d’essai. Tout le monde sait le tollé déclenché par cet énigmatiqueouvrage scientifique. Là-dessus, permettez-moi de parodier l’Évangile de Saint Jean : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec le Pouvoir, et la Parole était Pouvoir, et la Parole devint Réalité… ». C’est donc le point de départ d’une nébuleuse saga politicienne dont l’issue n’aura été qu’un secret de Polichinelle. Ce n’est d’ailleurs pas étonnant que le même homme (initiateur ou concepteur de la révision constitutionnelle) ait officialisé aujourd’hui la position du PPRD, le parti présidentiel et le premier de la MP.
2) Dans son discours du samedi 05 octobre 2013 devant le Congrès, à l’occasion de la cérémonie de clôture des travaux des Concertations Nationales, le Chef de l’État lui-même avait déjà insinué (soufflé ?) la modification de la Constitution, préparant quasiment les esprits de sa MP à franchir le Rubicon comme on le voit aisément aujourd’hui. En revoici un extrait édifiant : « S’agissant des élections, je recommande à la CENI d’envisager, dès ce jour, la présentation au Parlement, dans le meilleur délai, du calendrier électoral et de poursuivre le cycle électoral en vue de procéder avec diligence, à l’organisation des élections locales, municipales, provinciales et sénatoriales. J’invite par ailleurs les deux chambres de notre Parlement ainsi que le Gouvernement à mener une réflexion prospective sur le mode de scrutin proportionnel. Il y a lieu également d’entrevoir les modalités pratiques d’organiser les élections provinciales au suffrage universel indirect, afin de minimiser le coût des opérations électorales ». Des non-dits qui en disent largement long…
3) Publié le 26 mai 2014 par la CENI de M. Apollinaire Malumalu, le calendrier électoral ne traite que des élections urbaines, municipales et locales. Par contre, aucun mot sur les provinciales et sénatoriales, en attendant bien sûr le feu vert du Parlement qui devrait logiquement cautionner l’option du suffrage universel indirect pour avaliser la proposition du Chef de l’État. Quant aux législatives nationales et à la présidentielle, le mystère demeure entier car nul ne sait si elles auront effectivement lieu dans les délais, c’est-à-dire avant l’échéance (fatidique ?) du 19 décembre 2016.
4) En Conseil des Ministres le lundi 09 juin 2014, le Gouvernement avait adopté un projet de révision constitutionnelle se rapportant justement aux élections, afin de « corriger les faiblesses qui ont été à la base des dysfonctionnements observés lors des deux précédents scrutins de 2006 et 2011, et de finaliser la décentralisation instituée par la Constitution de 2006 au moyen de l’organisation effective des élections au niveau local ». Le problème ? C’est que le Gouvernement s’enferme dans un mutisme déconcertant sur la matière ou la nature des articles à revisiter. Qui sait si ce simple aménagement de quelques articles de la Constitution n’impactera pas sur l’incertaine présidentielle de 2016 et le mandat en cours du Chef de l’État, même sans faire sauter le verrou tant redouté de l’article 220 ?
5) « Totondi Kabila nainu te ; Kabila mposa na yo esili te ». Tel est l’intitulé de la campagne politique initiée depuis plus de cinq mois par M. Tryphon Kin-Kiey Mulumba, (Ministre des PT-NTIC), dont l’objectif vise le maintien au pouvoir du Chef de l’État au-delà de décembre 2016. Réagissant à ce sujet lors de sa conférence de presse du jeudi 03 juillet 2014, M. Lambert Mende (porte-parole du Gouvernement) est resté égal à lui-même, prétextant que la RDC étant une démocratie, chaque citoyen est libre d’afficher ses convictions politiques. Comme à son accoutumée, il apostropha la presse, non sans tancer son homologue des PT-NTIC :« J’espère, Madame, que vous ne nous recommandez pas de commencer à arrêter les gens parce qu’ils écrivent ‘‘Kabila totondi yo nainu te ; Kabila mposa na yo esili te’’. Vous n’avez jamais entendu une telle position des Instances officielles de la Majorité. La Majorité vous dit des choses ; le Gouvernement vous dit des choses ; le Président vous dit des choses et vous allez chercher le point de vue obscur d’un obscur cadre de la Majorité » ! Cette étonnante réaction suscita l’ire du Ministre incriminé (http://7sur7.cd/index.php/8-infos/7180-quand-kin-kiey-prend-mende-a-defaut-avec-elegance#.U-HsPqO0AtU) et des remous au sein de la MP. Admettons que tout Congolais soit libre de ses opinions politiques. Néanmoins, M. Tryphon Kin-Kiey Mulumba n’est pas un citoyen ordinaire, mais bien un Ministre du Gouvernement, astreint au devoir de réserve. Comme si cela ne suffisait pas, joignant l’acte à la parole, ce dernier lançait, le 30 juillet 2014, l’association « Kabila Désir » pour « fédérer » les Congolais afin de « promouvoir le bilan du Chef de l’État et soutenir sa vision ». N’est-ce pas étrange de militer pour le maintien au pouvoir d’un Président de la République qui se trouve officiellement à son deuxième et dernier mandat ? Par quelle magie peu-t-on donc y arriver si c’est n’est la révision constitutionnelle ?
6) M. Aubin Minaku (Président de l’Assemblée nationale) est encore plus formel sur le sujet (cf.http://afriquecanada.tv/evenements/786/rencontre+aubin+minaku+diaspora+canada.flv.html). En scrutant son exposé lors de sa rencontre avec la diaspora PPRD & MP à l’Ambassade de la RDC au Canada, en marge des travaux de la 40ème Session de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie tenue du 03 au 08 juillet 2014 à Ottawa, l’on se rend compte de la détermination et la volonté manifestes du régime de revisiter la Constitution parce que « toute Constitution valide au monde prévoit sa propre procédure révision » et que « touche pas à ma Constitution est un discours anticonstitutionnel ». Chaque fois qu’il épinglait d’ailleurs le bilan positif ou les gros progrès réalisés par la RDC sous l’impulsion du Chef de l’État et de la MP, ainsi que les risques de balkanisation qu’encourt le pays en cas de précipitation de l’élection présidentielle, ses propos furent sans surprise entrecoupés et ponctués des salves d’applaudissements. Après son retour au pays, M. Aubin Minaku explicita cette position de sa famille politique dans une large interview à la presse kinoise le 17 juillet 2014, en évoquant l’article 218 et deux hypothèses envisageables dont « le vote du Parlement » et « le referendum populaire », non sans préciser que « la MP tient à conserver le pouvoir (…) selon le standard international de toute démocratie ». Conserver le pouvoir ? D’accord ! C’est d’ailleurs un droit inaliénable pour la MP. Mais avec qui à sa tête ? C’est là que le bât blesse… Relativement à cette problématique, M. Aubin Minaku se rappelle-t-il ses propres propos du 11 octobre 2013 dans une interview à RFI ? Cf. http://www.rfi.fr/afrique/20131011-aubin-minaku-president-kabila-partira-apres-elections-rdc/. Ou encore cette autre interview accordée à Jeune Afrique le 28 janvier 2014 ? Cf.http://www.jeuneafrique.com/Articles/Dossier/JA2767p068.xml0/joseph-kabila-rdc-pprd-constitution-congolaiserdc-aubin-minaku-kabila-respectera-la-constitution.html. Comme qui dirait, le passé finit toujours par nous rattraper…
7) Le samedi 19 juillet 2014, devant les bourgmestres et chefs de quartier de la ville de Kinshasa, M. Richard Muyej (Ministre de l’Intérieur) précise que le projet de loi relative à la révision constitutionnelle, proposé par le Gouvernement, ne concerne pas l’article 220 de la Constitution, tout en prévenant que celui-ci peut être modifié par voie référendaire : « Comme le peuple souverain s’est exprimé par voie référendaire en décembre 2005 par un oui massif pour la constitution actuelle, il reste le seul à pouvoir modifier les dispositions interdites au Parlement par la même voie du référendum constitutionnel ». Quant aux élections à venir, il fait savoir que « le Gouvernement est tenu d’accompagner la CENI dans l’organisation de toutes les élections par un appui logistique et financier ainsi que leur sécurisation, et en conformité avec le calendrier qu’elle a établi et établira en tant que structure indépendante d’appui à la démocratie ». Dans ce cadre, il affirme soutenir « les élections au suffrage indirect des députés provinciaux, sénateurs, bourgmestres, gouverneurs, maires et conseillers urbains, tel que proposé par la CENI dans sa feuille de route présentée à l’Assemblée Nationale le 30 janvier dernier » puisque « le suffrage universel indirect ne rabaisse pas le niveau de la démocratie en RDC. Par contre, il a l’avantage d’être souple et moins coûteux ». Ici, le Ministre Richard Muyej ne fait qu’expliciter la « proposition initiale » du Chef de l’État, déjà approuvée par la CENI.
8) Le mardi 29 juillet 2014, comme pour boucler la boucle, M. Évariste Boshab lâche du lest: « Le PPRD est favorable à la révision constitutionnelle car réviser la Constitution, c’est aussi la respecter ; cette révision constitutionnelle peut se faire par voie référendaire ». Il n’y a pas photo ! Devant les cardes de son parti, le Secrétaire Général du PPRD est allé droit au but : « En ce qui concerne la révision constitutionnelle (…), le PPRD réaffirme sa position constante ; selon laquelle lorsque le peuple vous confie un mandat pendant une période déterminée, c’est pour que vous puissiez procéder également aux réformes institutionnelles nécessaires qui procurent le bien-être à la population, dont notamment la paix sociale, la sécurité et la stabilité ». À la suite des autres cadres du PPRD, il insiste : « La Constitution de la République démocratique du Congo elle-même a prévu la manière dont elle peut être révisée. S’incruster dans cet interstice, c’est aussi respecter la Constitution ». C’est ainsi que le peuple congolais, qui a donné mandat à ses élus, « garde également la possibilité de s’exprimer directement par la voie du référendum ». Avant de poursuivre dans la même lancée : « Tout État qui se respecte doit pouvoir tirer les conséquences de l’évolution des mentalités, pour que la logique institutionnelle soit en harmonie avec les aspirations de la population. Dans ce cadre, le PPRD tirera toutes les conséquences entre une Constitution paix de braves entre belligérants et une Constitution dont la mission est de faire de notre pays un État émergeant ». Et de conclure, sur les élections au niveau local, que le PPRD les salue naturellement et y va surtout « pour conserver le pouvoir ». Qu’en déduire ? Le masque vient enfin de tomber ! Le Secrétaire Général du PPRD est resté fidèle au schéma de son parti : la révision constitutionnelle et la conservation du pouvoir à tout prix ! Ce qui surprend néanmoins, c’est qu’il y a exactement une année, soit le 29 juillet 2013, M. Évariste Boshab soutenait tout le contraire de ce qu’il affirme aujourd’hui, en déclarant notamment que « le PPRD n’a jamais fait de requête pour pouvoir réviser l’article 220 de la Constitution ». Bien plus, lors du mini congrès organisé par son parti en avril 2014 à Mbandaka, il avait réitéré la même position, non sans insistance : « le PPRD respectera la Constitution et alors toute la Constitution ». Comment expliquer alors ce revirement à plus 180° aujourd’hui ? Sûrement des manœuvres dilatoires devant gagner du temps et calmer la tempête suscitée par sa dernière « trouvaille scientifique ». Décidément, la question de la révision constitutionnelle hante désormais les esprits du régime, et a, plus que jamais, rendez-vous avec l’histoire…
Inconstance et stratégie irrationnelle de la MP
Je préfère m’en tenir à ces faits pour éviter une énumération fastidieuse. Sans m’étendre longuement sur bien d’autres initiatives qui préconisent carrément un changement radical de Constitution, l’actuelle étant l’œuvre des seigneurs de guerre et inadaptée au contexte actuel. M. Évariste Boshab n’en dit d’ailleurs pas autre chose. Y compris le Pasteur Théodore Mugalu, chef de la Maison civile du Chef de l’État, lors de sa très médiatique sortie à la télévision nationale (RTNC) le samedi 09 août 2014 : « Il faut brûler la Constitution du 26 février 2006 parce qu’elle est un plagiat qui honore les belligérants. Allons au référendum et remplaçons-la par celle qui respecte Dieu. Seule la Bible est verrouillée, mais pas notre Constitution » (cf. http://www.digitalcongo.net/article/101767). Tout comme le Chef de l’Église du Christ au Congo (ECC), Monseigneur Marini Bodho, un autre Homme de Dieu qui est favorable à la modification de la Constitution. Concernant cette question, le dignitaire protestant s’est confié à Radio Okapi le jeudi 07 août 2041. Suivons plutôt sa position à travers ce lien :http://radiookapi.net/actualite/2014/08/07/rdc-mgr-marini-bodho-favorable-la-revision-de-la-constitution/.
À l’évidence, cette inhabituelle ruée sur la Loi des lois dénote le dessein du tripatouillage, désormais clair comme de l’eau de roche. Plus besoin d’un autre dessin après que le PPRD ait éventré le boa. Pourtant, face au silence quasi-éternel du Chef de l’État sur le sujet, le très politiquement incontournable Lambert Mende et d’autres ténors du régime amplifièrent, à sa place, des dénégations qui attendent toujours de convaincre la Nation deses bonnes intentions de respecter la Constitution. Évoqueront-ils encore les commérages malveillants, les ragots et racontars inutiles, les médisances et simples rumeurs sans fondement, l’intox et le procès d’intention ? Visiblement, le discours de la MP recèle l’inconstance mêlée à l’irrationalité. Au départ de cette mandature et jusqu’il y a peu encore, elle clamait interminablement que la Constitution ne serait pas modifiée et que le Chef de l’État ne postulerait pas non plus pour un troisième mandat, interdit par la loi ! Présentement, elle se met officiellement en ordre de bataille et ratisse large pour la révision constitutionnelle et le référendum populaire. Où va donc notre Congo ? Les dés étant jetés, s’achemine-t-on vers un remake de 2011 ou une refonte complète ? Vers une présidence à vie ? En effet, rappelons-nous que dix mois avant la présidentielle de 2011, la Constitution avait déjà été modifiée pour accroître les pouvoirs du Président de la République et réduire ce scrutin à un seul tour, empêchant alors les alliances politiques de se nouer en cas d’un second tour et inhibant de facto l’expression d’une démocratie réelle. Du coup, le Chef de l’État fut réélu par une minorité de Congolais, à la majorité simple. Aujourd’hui encore, le scénario semble se répéter, étant donné le doute ou la grande incertitude de la MP sans son autorité morale pour l’horizon 2016. Toute Constitution est certes révisable. Il n’est cependant pas concevable de modifier les règles de jeu à l’approche de chaque scrutin présidentiel. Sinon, la MP peut-elle justifier l’opportunité nationale d’une deuxième révision en si peu de temps ? En démocratie, l’on ne se sert pas arbitrairement des textes de lois comme une stratégie de combat politique pour la conservation du pouvoir. La loi doit être permanente, impersonnelle et respectée par tous, à commencer par le pouvoir public qui en est le garant. Ainsi, elle ne peut être modifiée à tout bout de champ, au gré des appétences narcissiques des hommes au pouvoir. Ce jusqu’auboutisme politique expose le pays aux conséquences imprévisibles. La tension étant à son comble, l’on vit déjà une quasi-impasse avant l’heure. S.E. Mgr Nicolas Djomo (Président de la CENCO) résume merveilleusement bien notre situation actuelle : « on dirait qu’il y a des nuages, un tonnerre qui gronde ». Tout le monde le sait et en parle abondamment, y compris le citoyen lambda. Quoi de plus normal dans une démocratie et un État de droit !
Cette liberté d’expression étant reconnue aux autres catégories de citoyens, pourquoi la refuserait-on aux Évêques ? Ont-ils tort de s’exprimer, eux aussi, sur la res publica qui est notre patrimoine commun à tous ? Cesse-t-on d’être Congolais quand on devient Ecclésiastique ? Pour tenter vainement de convaincre, le régime et ses comparses n’ont qu’un seul refrain à la bouche : « Il faut rendre à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui est à Dieu », appelant alors les Catholiques à « faire une claire distinction entre foi et politique » puisque « leur Église s’occupe un peu trop de la politique et du pouvoir ». Se préoccuper de l’avenir de la Nation et du sort du peuple de Dieu signifie-t-il confondre foi et politique ou s’occuper du pouvoir ? À mon avis, c’est plutôt la vérité de la parole des Évêques qui fait peur, qui trouble les esprits et qui explique l’agitation, l’offensive et le harcèlement politico-médiatiques en cours. Il sied de préciser que Dieu et César ne sont pas en guerre. Ce dernier est peut-être notre maître terrestre. Mais, comme les autres humains, il doit aussi allégeance à Dieu qui est son Créateur. Ainsi, les commandements de Dieu s’adressent et à César et à ses sujets que nous sommes, et qu’il ne peut manipuler à sa guise. Car, avec lui, nous sommes tous des êtres créés à l’image de Dieu. En outre, il est établi que la problématique de la révision constitutionnelle n’est pas une imagination de la CENCO, mais bien l’œuvre même du Pouvoir. Il n’y a pas de fumée sans feu. Autrement dit, il y a toujours quelque chose de vrai à l’origine des rumeurs. Sinon, où en sommes-nous aujourd’hui ? Face au danger réel qui guète la RDC et enéveilleurs de conscience justement, les Évêques ont pleinement le droit et le devoir pastoral de nous mettre en éveil et d’interpeller nos gouvernants, y compris l’opinion nationale et internationale, sur les questions brûlantes de notre société. Cet engagement sociétal des Évêques relève bien de leur mission même, en fidélité au Christ et en parfaite communion avec le Pape et l’Église universelle. En clair, la CENCO n’a jamais « tourné le dos à Rome » comme l’insinuent les mauvaises langues et autres pêcheurs en eau trouble qui n’ont d’autre visée que de discréditer l’Église catholique dont ils prétendent railleusement défendre la doctrine et les valeurs, soi-disantmenacées par la rébellion de la CENCO en RDC !
Réflexes pavloviens
Comme annoncé à l’introduction de ce message, je ne puis clore mon propos sans remercier également le frère Albert R. Teuwen. Sa brève intervention dans ce débat m’avait vraiment émerveillé et paru comme une interpellation qui questionne notre conscience d’intellectuels, en nous invitant à la sérénité dans nos jugements et à la responsabilité. Revoici son fraternel conseil : « Intellectuels de la PO, avons-nous perdu notre objectivité ? Avons-nous perdu notre sens critique et d’analyse ? Est-ce que nous revenons à l’époque du parti unique, de la pensée unique ? Est-ce que la CENCO n’a pas ce devoir et ce droit de donner une opinion sans qu’elle ne soit accusée d’ingérence ? Etc. Avons-nous analysé les résultats des dernières révisions de la Constitution ? Est-ce que notre démocratie évolue bien ? Bonne réflexion ». À sa suite, j’estime que quand un intellectuel reste foncièrement fanatique et défend une cause avec acharnement et passion, il perd justement tout esprit critique, tout sens d’analyse et toute lucidité. Il cesse d’être objectif et devient ipso facto borné, obstiné et attaché, comme un objet, à ce pourquoi il se bat à tout prix, à l’instar d’un esclave qui entreprend toute chose pour plaire à son maître. Ce genre d’intellectuel abhorre la contradiction, le débat d’idées ou l’expression plurielle, en ne voyant jamais rien de bon dans ce que propose l’autre. Surtout s’il est au service d’une idéologie dominante, imposée d’autorité par endoctrinement ou par l’appât du gain qui motive tout son être. C’est comme le célèbre « chien de Pavlov », mondialement connu pour ses réflexes conditionnés par le son de cloche au moment de chaque repas.
Face à la vérité ou à l’évidence des faits, il se dessine souvent trois catégories d’acteurs : ceux qui comprennent, ceux qui ne comprennent pas et ceux qui refusent de comprendre. Ces derniers sont les plus dangereux car étant impassiblement figés dans leurs certitudes, quoi qu’il arrive. Pourtant, nos pulsions des cœurs, nos imaginations et convictions personnelles, nos supputations et pressentiments subjectifs, concernant des questions que nous ne maîtrisons pas assez, débouchent généralement sur des raisonnements erronés, absurdes et déroutants, faute de preuves. Comme l’on dit, il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, ni pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. L’obstination intentionnelle à ne vouloir rien comprendre, dans ce qui paraît lucide, relève non seulement d’une mauvaise foi et de la méchanceté, mais également d’une malhonnêteté intellectuelle condamnable par la loi morale qui, malheureusement, ne représente plus grand-chose aux yeux des Congolais que nous sommes. En effet, la RDC étant un pays où tout se marchande en raison du culte de l’argent et de la corruption, y compris la conscience humaine, surtout celle des intellectuels et des hommes politiques, d’aucuns redoutent, à la suite de la CENCO, le pire des scénarios quant à la Constitution, c’est-à-dire des surprises désagréables à l’horizon 2016. Au milieu de cette confusion morale à la limite du désert, l’Église ne se lassera jamais de prêcher, à temps et à contretemps,l’Évangile du Christ qui est amour, justice et vérité, ni de jouer pleinement son rôle de véritable Protecteur de la Nation et ses populations. Ni notre incroyance, ni notre intolérance, ni rien au monde ne l’y dissuaderont. Bien au contraire, nos tares humaines constituent justement des défis pastoraux énormes qu’elle doit constamment relever dans son œuvre libératrice et sa mission salvifique. Qu’on le veuille donc ou non, l’on ne réussira nullement à réduire les Évêques au silence. Ils demeurent, par excellence, la voix des sans voix congolais. Et pour toujours !
In fine, au vu du contexte sociopolitique actuel de la RDC, le « Protégeons notre Nation » de la CENCO aux Congolais est-il un « jet illico presto de l’anathème » ou « un procès d’intention » fait à la Majorité au pouvoir ? Est-ce une guerre larvée de l’Épiscopat congolais contre le Chef de l’État ? Non, à mon entendement. Il s’agit plutôt d’un message éminemment prophétique et évangélique, qui interpelle nos gouvernants et le peuple tout entier, chacun en ce qui le concerne, sur les enjeux électoraux de l’heure dans notre pays, afin de préserver et de consolider ce qui nous reste encore d’acquis démocratiques, pour ne pas retomber dans les erreurs du passé. Cette louable exhortation pastorale, tombée à point nommé, est un avertissement de la CENCO qui met la Nation en garde contre les risques d’une course effrénée vers des lois toujours taillées su mesure, qui symbolisent une démocratie clés en mains, elle-même étant le reflet d’une dictature rampante qui ne dit pas son nom. Chère Lisago, voilà, en homme libre, ma lecture de la dernière interpellation de la CENCO aux Congolais. Et si les Évêques avaient raison ?
Louis BASINGA
Bweng'aa Ngelessa
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