mercredi 31 décembre 2014
lundi 29 décembre 2014
Vital Kamerhe répond avec preuves aux allégations de Honoré Ngbanda, mais attention, Honoré cherche plutot son arbre généalogique du coté papa, autrement dit identités de grands parents paternels ! Mais c'est déjà bon, voir très bon, pour vos sympathisants et disciples de pouvoir clouer le bec aux manipulateurs de tout acabit !
samedi 27 décembre 2014
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RD CONGO : La stratégie du chaos et du mensonge
par MUSAVULI samedi 13 décembre 2014
La guerre qui sévit en République Démocratique du Congo, et ses horreurs, sont souvent présentées comme l’échec du président Kabila et de la communauté internationale. Il s’agit, en réalité, d’une réussite éclatante d’une stratégie dont le Congo et les Congolais sont la cible. Le dernier ouvrage de l’analyste des questions géopolitiques Patrick Mbeko, « Stratégie du chaos et du mensonge », en donne une remarquable démonstration. L’auteur analyse les enjeux qui se trament derrière les souffrances des Congolais depuis l’acquisition du pays par le Roi des Belges Léopold II, en 1885, jusqu’à sa mise sous tutelle actuelle, par les milieux d’affaires occidentaux derrière le triumvirat Museveni-Kagame-Kabila et la Monusco.
Lorsqu’on jette un coup d'œil sur l'holocauste qui se déroule au Congo, avec ses millions de morts, les clichés des reportages sur l'Afrique sont qu’il s'agit de conflits entre tribus africaines au« Cœur des ténèbres ». Patrick Mbeko, qui coécrit l’ouvrage avec un fin connaisseur des enjeux du Congo, en la personne d’Honoré Ngbanda[1], va droit au cœur des enjeux de la guerre. A l’appui des enquêtes des Nations-Unies il démontre que l’instabilité chronique à laquelle nous assistons est entretenue à dessein. Il s'agit d'une politique de chaos sciemment organisée qui a pour objectif d'affaiblir durablement le pays, d'en faire un non-État, réduit au simple rôle de coffre-fort où les groupes financiers et les élites occidentales puisent d'immenses richesses naturelles sans être importunés. Il s'agit de la mise en pratique de la théorie longuement murie du « chaos constructeur », chère aux stratèges américains.
La stratégie du chaos dans le cas du Congo
Dans une région riche et convoitée, on choisit d’abord un Etat pivot[2]. Ensuite, à partir de cet Etat, on provoque et on entretient les conflits. On encourage les viols, on occasionne des déplacements des populations, on génère la famine, des maladies, bref, on engendre une atmosphère de désolation. De ce chaos doit émerger un ordre nouveau reposant sur l'anéantissement des peuples et permettant à la minorité des privilégiés constituant le 1 % de maintenir leur train de vie princier[3]. Toutes les guerres qui se produisent au Congo ont pour enjeu le contrôle des matières premières, dont les riches gisements miniers du pays[4]. Pour entretenir durablement le chaos, les « stratèges » commencent par remporter la bataille de l’information. Dans le cas du Congo, le contrôle de l’information se traduit par une gigantesque masse des désinformations destinées à dissimuler, non seulement les vrais enjeux de la guerre, mais surtout les personnalités et les multinationales qui se procurent, derrière le chaos entretenu, des profits faramineux.
Un dispositif à trois têtes
Pour que perdure cette économie du chaos qui permet aux multinationales anglo-américaines d’engranger des profits toujours faramineux, un dispositif politique a été mis en place. Il est articulé autour d’un triumvirat[5] associant les trois présidents tutsi/hima de la région : l’Ougandais Yoweri Museveni dans le rôle de l’architecte, le Rwandais Paul Kagame dans le rôle du maître d’ouvrage et « Joseph Kabila »[6] dans le rôle du « cheval de Troie ». Les trois hommes, par leurs armées respectives, ont pour mission de maintenir le Congo dans une situation permanente d’Etat raté, avec une armée congolaise continuellement paralysée et mise dans l’incapacité de s’imposer, même face à un banal groupe armé. Pourquoi ? Parce qu’un Congo qui se redresse, et dont les autorités prennent le contrôle effectif du territoire national, serait un frein aux intérêts des multinationales qui gravitent autour des présidents Kagame, Museveni et Kabila.
Mais dans le cas spécifique du Congo, à côté des intérêts des multinationales anglo-américaines, les désordres fomentés par les trois présidents servent les objectifs d’une élite régionale, l’élite tutsie rwandaise. Cette dernière, bien que n’appartenant à aucune des tribus autochtones congolaises[7], avaient tout de même revendiqué, dès 1981, dans une lettre adressée au Secrétaire général de l’ONU[8], l’ambition de détacher la riche région du Kivu pour la rattacher progressivement au Rwanda. Ce qui est quasiment en train de se réaliser grâce au travail destructeur des trois présidents[9]. Le drame pour le Congo est que les ambitions de cette minorité régionale coïncident avec les intérêts de la minorité des privilégiés occidentaux, les fameux 1%, qui maintiennent leur train de vie en entretenant le chaos dans différentes régions riches du monde.
Le modus operandi
Concrètement, dans le cas du Congo, les présidents Museveni et Kagame, avec l’appui des Américains et des Britanniques, « fabriquent » des mouvements armés et utilisent leurs réseaux auprès des médias occidentaux pour faire croire à l’opinion internationale qu’il s’agit de« rébellions congolaises ». En réalité, il s’agit de bataillons de leurs propres armées dont les unités sont formées dans les bases de Jinja, en Ouganda ; de Gako, de Butotori et de Gabiro au Rwanda par des instructeurs américains et britanniques. Une fois ces bataillons ont franchi les frontières du Congo, « Joseph Kabila », qui fait partie de « la bande des 3 » (les trois K), organise la défaite des soldats congolais et laisse les villes congolaises tomber entre les mains des bataillons ennemis. Viennent ensuite des négociations qui, en réalité, sont une mascarade. Lorsque « Joseph Kabila »arrive dans ces négociations il est tout heureux de retrouver ses paires Museveni et Kagame, et d’ailleurs les images de ces retrouvailles ne s’y trompent pas. Ces négociations aboutissent à au moins deux « compromis » : les « rebelles » (faux rebelles mais vrais soldats rwandais/ougandais)obtiennent des amnisties collectives ou individuelles décidées par le gouvernement faible de Kinshasa. Ensuite, ils sont intégrés dans l’armée congolaise.
La dernière vague des troupes rwandaises intégrées dans les rangs de l’armée congolaise s’est opérée en décembre 2008, et dans les mois qui ont suivi, en marge des opérations « Umoja wetu »et « Amani leo ». C’était en application d’un accord secret conclu par le représentant de « Joseph Kabila », le général John Numbi, et Laurent Nkunda sous la supervision du général rwandais James Kabarebe[10]. Plusieurs milliers de soldats rwandais avaient passé la frontière congolaise, officiellement pour mener avec les Congolais une lutte conjointe contre les rebelles hutus rwandais des FDLR, qui, pour l’auteur, sont devenus le prétexte dont se servent les élites occidentales et leurs médias pour légitimer l’occupation et le pillage de l’Est du Congo par les hommes de Kagame. Deux mois plus tard, une mascarade fut organisée à Goma pour faire croire à l’opinion internationale que les troupes rwandaises avaient regagné leur pays. Un de ces gros mensonges auxquels les trois présidents et leurs parrains occidentaux ont habitué les Congolais. Patrick Mbeko estime que plus de 12 mille soldats rwandais arrivés sur le sol congolais avaient disparu dans la nature. Pour aller où ? Cette opération visait, en réalité, à accroitre le nombre des agents rwandais infiltrés dans les rangs de l’armée congolaise.
Que deviennent les agents que Kagame et Museveni font entrer au Congo ?
Il y en aurait plus de 35 milles dans différents niveaux de l’armée, de la police et de l’administration. Ils ont pour mission de paralyser les actions de l’armée congolaise dans le Kivu. Ils fournissent des renseignements à l’ennemi et détournent les livraisons d’armes au profit du camp ennemi. Ils permettent aux « rebelles » de tendre des embuscades réussies et d’infliger de lourdes pertes aux soldats congolais déterminés à rétablir le contrôle de l’Etat sur le Kivu. La plus terrible des défaites qu’ils ont réussi à faire subir aux soldats congolais s’est produite en décembre 2007 dans la localité de Mushake, près de Goma. Sur les 4.500 éléments des FARDC[11] engagés dans l’opération, 2.300 avaient été tués[12] par des combattants rwandais dirigés par le général tutsi Laurent Nkunda. L’homme que les médias occidentaux présentaient comme un « Tutsi congolais »avouera, de retour dans son pays, qu’il est citoyen rwandais ; un sergent de l’armée rwandaise, membre des services de renseignements rwandais[13].
Et lorsque, malgré le travail de sape, les soldats congolais parviennent tout de même à prendre le dessus sur les semeurs de troubles, les infiltrés ne désarment pas. Les soldats congolais qui ont brillé sur les théâtres des opérations au Kivu sont rapidement mutés et éloignés des missions opérationnelles. Nombreux sont assassinés quelques temps seulement après les victoires sur les agresseurs. L’ouvrage cite plusieurs cas d’assassinat. Il évoque le cas du général Mbuza Mabé[14]qui, après avoir libéré la ville de Bukavu des mains des Rwandais, en 2004, a été rappelé à Kinshasa[15]. Ce travail permanant de sabotage, mené au cœur même de l’armée congolaise, permet à Museveni et Kagame d’être rassurés. Les deux dirigeants peuvent continuer à entretenir le chaos dans les régions riches de l’Est du Congo, qu’ils ambitionnent d’annexer, sans risquer d’être confrontés à une armée congolaise aguerrie.
Pourquoi les médias et des pays comme les Etats-Unis participent à ce désastre ?
Dès le déclenchement de la guerre en 1996, les Etats-Unis parrainaient les armées rwandaises et ougandaises qui avaient franchi la frontière congolaise sous la fausse étiquette de « rebelles banyamulenge » puis de « rebelles de l’AFDL ». Pour les Américains, le Congo est un trop riche pays pour être laissé aux seuls Congolais. Sa riche région du Kivu doit être annexée au Rwanda, un pays petit et pauvre mais dont l’élite est docile aux yeux des dirigeants américains. Le reste du Congo devrait ensuite s’effondrer en petites « républiques corvéables » et faciles à contrôler par les intérêts anglo-américains. Depuis, les dirigeants américains et leurs alliés soutiennent le projet de balkanisation du Congo. En témoignent leurs déclarations, parfois intempestives[16]. Pour les Américains, les Britanniques et leurs différentes officines, l’Est du Congo appartient ou doit appartenir aux hommes de Kagame avec qui ils réalisent de juteuses affaires, et avec qui ils devraient continuer à réaliser des affaires toujours plus juteuses si la balkanisation devient officielle.
Pour ce qui est de la désinformation consistant notamment à appeler « rebelles congolais » des« soldats rwandais/ougandais », Patrick Mbeko fait remarquer que les principaux médias occidentaux sont détenus par des groupes financiers dont les investisseurs ont des intérêts dans les multinationales impliquées dans la guerre du Congo. Une partie des noms de ces multinationales apparaît dans les rapports des experts de l’ONU. Lorsque les journalistes parlent de « rebelles congolais » alors qu’ils savent, du fond de leur conscience, qu’il s’agit de « soldats rwandais/ougandais », ils obéissent à la ligne éditoriale qui leur est imposée par les patrons de leurs organes de presse. L’auteur, qui est lui-même journaliste, ne s’offusque pas du fait que son ouvrage, bien qu’en tête des ventes sur le site amazone.fr, ait été boycotté par les grands médias.
Pourquoi les massacres des populations congolaises ?
Les dirigeants tutsis rwandais/ougandais, et leurs parrains anglo-américains, sont toutefois confrontés à un obstacle : les populations autochtones de l’Est du Congo sont profondément hostiles au projet de balkanisation. Elles continuent de résister malgré la complicité du« président » avec les ennemis. Pour briser cette résistance, le Rwanda et l’Ouganda auraient pris l’option d’attaquer directement ces populations. A force de les massacrer, de les violer et de les humilier, en assurant l’impunité aux agresseurs, ces populations finiront par se persuader qu’elles sont définitivement abandonnées par Kinshasa[17]. Elles n’auront pas d’autre choix que de se soumettre à leurs oppresseurs.
L’autre enjeu des massacres a des motivations purement génocidaires. Les populations congolaises tuées, violées et terrorisées fuient et abandonnent leurs terres, en général des terres très fertiles ou riches en gisement miniers. Les terres que ces populations éliminées abandonnent sont réoccupées par des populations en provenance du Rwanda et d’Ouganda. Ce processus d’élimination des autochtones et leur remplacement par des populations allogènes, devrait mener à un rééquilibrage démographique dans l’Est du Congo. Il devrait permettre l’organisation d’un référendum d’autodétermination. Ce scrutin bénéficiera de l’appui des pays occidentaux, déjà acquis au projet de balkanisation du Congo. Les Occidentaux feront en sorte que le vote en faveur de l’autodétermination l’emporte. Un premier pas vers la balkanisation du pays.
Et les droits de l’homme dans tout ça ?
L’auteur fait remarquer que la question des droits de l’homme est superbement esquivée dans les instances internationales, lorsqu’il s’agit des victimes congolaises. Les « droits de l’homme » des Congolais doivent être sacrifiés au nom des deux objectifs stratégiques : la balkanisation du Congo et le pillage continu des ressources minières au profit des milieux d’affaires anglo-américains. Arrêter et poursuivre en justice les dirigeants rwandais et ougandais qui organisent les massacres reviendraient, pour les dirigeants occidentaux, à se priver de précieuses mains dont ils ont besoin pour réaliser leurs objectifs sur le Congo.
Mais pour ne pas perdre la face, les Occidentaux se partagent les rôles. Les uns continuent d’armer le Rwanda et l’Ouganda, les autres dénoncent les crimes, les condamnent et produisent des rapports tonitruants. Mais ils s’abstiennent d’arrêter les criminels alors qu’ils savent où ils se trouvent, juste de l’autre côté de la frontière, au Rwanda et en Ouganda. Les diplomates occidentaux, quant à eux, doivent montrer aux Congolais qu’ils apportent la paix et la démocratie alors qu’ils travaillent pour les milieux d’affaires qui tiennent à ce que la guerre perdure. La guerre doit perdurer parce qu’elle génère des profits faramineux et reste le meilleur moyen d’amener le Congo à perdre progressivement ses riches régions de l’Est au profit des pouvoirs tutsis du Rwanda, d’Ouganda et des milieux d’affaires occidentaux.
Quid de l’ONU ?
L’ONU n’est pas au Congo dans l’intérêt du peuple congolais. En attestent les massacres et les viols qui se commettent à proximité des camps de la Monusco depuis les 15 ans de sa présence dans le pays. L’auteur fait remarquer qu’en 2003, l’Opération Artémis, pilotée par l’armée française, avec à peine 1.500 soldats, avait réussi à rétablir la sécurité en Ituri en trois mois[18]. La Monusco, avec ses 19.815 soldats et un budget annuel d’un milliard et demi de dollars est incapable de désarmer un seul groupe armé. En réalité, la Monusco travaille pour d’autres missions qui n’ont rien à voir avec la protection des Congolais. Ses intérêts sont même tout à fait contraires aux aspirations du peuple congolais à la paix. L’auteur, citant l’ancien président tunisien Habib Bourguiba, fait savoir qu’aucun gouvernement sérieux n’accepte le déploiement des troupes de l’ONU sur son territoire. Au mieux, l’action des missions onusiennes se résume à la stratégie de l’« ange bleu »[19]. Au pire, elle rend moins visible et légalise la déstabilisation du pays et l'immixtion étrangère dans ses affaires internes[20]. Pour l’auteur, la Monusco fait partie de la stratégie du mensonge destinée à donner aux Congolais l’impression qu’on se préoccupe de leurs souffrances alors que la communauté internationale poursuit au Congo des objectifs sans rapport avec les aspirations du peuple congolais à sa souveraineté et à la paix.
Mais tous les onusiens n’acceptent pas de participer à cette mascarade. C’est ainsi qu’en octobre 2008, le général espagnol Vincente Diaz de Villegas a démissionné[21] de son poste de commandant militaire de la mission de l’ONU au Congo, choqué par ce qu’il avait vu. L'Espagne, qui ne fait pas partie des pays impliqués dans le pillage du Congo, ne voulait pas jouer à ce « jeu ».
Que faire pour changer la situation ?
Patrick Mbeko insiste sur le fait que les Congolais ne doivent surtout pas espérer qu’une solution viendrait de prochaines élections. Il serait aberrant d’amener les Congolais aux élections pour la troisième fois dans les mêmes conditions que les deux élections précédentes (2006, 2011)[22]. Les Congolais doivent d’abord se libérer du régime de chaos qui leur est imposé. Ce travail de libération incombe aux masses populaires en commençant par leurs élites qui doivent réveiller la conscience collective et individuelle[23]. L’auteur interpelle au passage les élites d’autres pays africains. Si les instigateurs du chaos actuel au Congo parviennent à liquider le Congo, comme ils l’ambitionnent, ce sera au tour d’autres pays du Continent. Une vingtaine de pays africains, riches en ressources naturelles, sont menacés de subir le même sort que le Congo, suivant le même mode opératoire du « chaos constructeur ». Plusieurs fois dans l’ouvrage, l’auteur appelle les Africains à méditer sur ce qui est arrivé à la Libye de Mouammar Kadhafi, victime, comme le Congo, de ses ressources naturelles, que les mêmes stratèges occidentaux du « chaos constructeur » se sont, depuis, appropriées. Au détriment du peuple libyen.
Boniface MUSAVULI
[1] Honoré Ngbanda, ancien conseiller spécial en matière de sécurité du président Mobutu, est l’auteur de remarquables ouvrages sur le Congo. Entre autres, Ainsi sonne le glas ! Les derniers jours du maréchal Mobutu, Éd. Gideppe, Paris, 1998 ; Crimes organisés en Afrique centrale, Éd. Duboiris, 2004 ;… Il est le Président de l’APARECO (Alliance des Patriotes pour la Refondation du Congo) un mouvement qui prône la « résistance à l’occupation du Congo ».
[2] En l’occurrence le Rwanda de Paul Kagame et l’Ouganda de Yoweri Museveni.
[3] P. Mbeko, H. Ngbanda, Stratégie du chaos et du mensonge – poker menteur en Afrique des Grands lacs, Ed. de l’Erablière, 2014, p. 601.
[4] p. 569.
[5] pp. 407-516. Les rôles respectifs des trois présidents sont détaillés tout au long du chapitre VII.
[6] Après avoir exploré les incohérences et les contradictions entre les biographes de « Kabila »(pp. 453-473), et analysé des renseignements obtenus au bout de ses recherches personnelles, l’auteur aboutit à la conclusion que « Joseph Kabila » est un nom d’emprunt. Il recommande de le mettre entre guillemets.
[7] Patrick Mbeko explique le pourquoi de la création de la fausse ethnie « Banyamulenge » dite« Tutsis congolais ». Elle a servi à prolonger, sur le sol congolais, l’histoire du génocide des Tutsis au Rwanda pour mieux masquer les agressions que menaient les Américains et les Britanniques contre le Zaïre. Il saisit l’occasion pour démonter la distorsion de l'histoire des immigrations des populations rwandaises au Congo, depuis l’époque coloniale. pp. 321 et svts.
[8] Lettre du 20 juin 1981, adressée par les membres du « réseau tutsi » établis au Zaïre au Secrétaire général de l'ONU. p. 395.
[9] Lire pp. 395-398.
[10] pp. 496 et svts.
[11] FARDC : Forces armées de la République Démocratique du Congo, l’armée nationale congolaise.
[12] pp. 487-488.
[13] pp. 373.
[14] pp. 486-487.
[15] Depuis, il est décédé des suites d’une longue maladie causée, selon certaines langues par un empoisonnement.
[16] Parmi les déclarations citées dans l’ouvrage, celles de Johnnie Carson, sous-secrétaire d'État américain aux Affaires africaines durant le mandat Clinton (pp. 544 et svts.) ; Herman Cohen, ancien sous-secrétaire d'État américain aux Affaires africaines (pp. 560-561), Nicolas Sarkozy (531-533.),… et même, plus surprenant, des dirigeants belges comme Didier Reynders et Jean-Pascal Labille (pp. 534).
[17] L’auteur cite le cas de l’Ituri et lance un cri d’alarme : « … une bonne partie de la région de l'Ituri est de facto sous contrôle de l'Ouganda. Sans tambour ni trompette. Dans tout l'Ituri (Mahagi, Aru, Ariwara, Watsha...) la monnaie officielle d'échange et de consommation est le shilling ougandais ! Certains travaux publics de réfection de route et des bâtiments publics de l'État sont assumés par le pouvoir ougandais. Les postes frontaliers d'immigration et de douane sont contrôlés par des agents et des officiers ougandais. Des terres arables sont cédées aux fermiers ougandais qui font venir la main d'œuvre de l'Ouganda pour occuper le terrain. Plus grave, de plus en plus de congolais autochtones, pour la plupart des commerçants de la tribu Nande, approuvent cette forme « douce » de l'occupation, s'estimant trahis et abandonnés par le pouvoir central et leurs propres députés ». pp. 554.
[18] pp. 611-615.
[19] On donne l’impression de s’occuper d’un problème alors qu’on ne s’en occupe pas.
[20] Cette immixtion peut être lourde de conséquences. Lumumba fut assassiné avec la complicité de l’ONU en 1960. Laurent-Désiré Kabila a subi le même sort en janvier 2001. « Demain, on peut se demander et savoir qui est la victime en ligne de mire ». pp. 616.
[21] pp. 617.
[22] L’Est du Congo est toujours contrôlé à 80% par le Rwanda et l’Ouganda. pp. 397, 640.
[23] pp. 640-641.
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Le discours du Dr Denis Mukwege à Strasbourg, le 26 novembre 2014
Monsieur le Président du Parlement Européen,
Mesdames et Messieurs les Représentants des peuples de l’Union
Européenne,
Distingués invités,
C’est avec beaucoup d’humilité et un grand espoir que je reçois
aujourd’hui le prestigieux Prix Sakharov pour la liberté de l’esprit.
Cette année, vous avez commémoré le centième anniversaire de la première
guerre mondiale. L’Europe pensait que c’était la dernière et que la civilisation
allait triompher. Non hélas, 30 ans plus tard, la folie humaine était de nouveau
au rendez-vous.
Depuis, vous avez fait le choix de la paix et de vivre ensemble, dans
une société orientée vers la liberté et la prospérité.
Dans un contexte sécuritaire de plus en plus instable, où les foyers de
crise se multiplient, notamment dans le voisinage direct de l’Union Européenne
(UE), je tiens avant tout à remercier les élus des peuples européens pour
mettre en lumière les tragédies humaines que vivent les femmes victimes de
viols et de violences sexuelles à l’Est de la République Démocratique du Congo
(RDC).
Dans un monde d’inversion des valeurs où la violence se banalise en
prenant des formes toujours plus abominables, refuser la violence, c’est être
dissident.
En attirant l’attention du monde sur la nécessité de protéger les femmes
en période de conflits armés, vous avez refusé l’indifférence face à l’une des
plus grandes catastrophes humanitaires des temps modernes.
Vous avez réaffirmé que la résolution des conflits dans les Grands Lacs
et la promotion des droits de l’homme et de la démocratie sont et restent des
priorités de la politique étrangère de l’UE.
Par ce prix, vous avez décidé d’accroître la visibilité du combat mené
par les femmes congolaises depuis plus de 15 ans et de reconnaître leur
souffrance mais aussi leur dignité et le courage qu’elles incarnent.
Monsieur le Président,
La région où je vis est l’une des plus riches de la planète ; pourtant
l’écrasante majorité de ses habitants vivent dans une extrême pauvreté liée à
l’insécurité et à la mauvaise gouvernance.
Le corps des femmes est devenu un véritable champ de bataille, et le
viol est utilisé comme une arme de guerre.
Les conséquences sont multiples et impactent sur l’ensemble de la
société : la cellule familiale est désagrégée, le tissu social détruit, les
populations réduites en esclavage ou acculées à l’exil dans une économie
largement militarisée, où la loi des seigneurs de guerre continue à s’imposer
en l’absence d’un état de droit. Nous sommes donc face à une stratégie de
guerre redoutablement efficace.
L’autorité de l’Etat congolais et ses institutions restent fragiles,
et ne sont pas encore en mesure ni de protéger la population, ni de satisfaire
à ses besoins de base.
Monsieur le Président,
Rares sont les jours où l’actualité de ma région ne révèle pas un nouveau
drame humain.
La semaine dernière, plus de 50 personnes ont été massacrées à la
machette dans le territoire de Béni au Nord-Kivu : les femmes enceintes sont
éventrées et les bébés mutilés. Dans l’espace d’un mois et demi, 200 personnes
ont été sauvagement tuées.
Comme tout être humain, je voudrais tant ne plus évoquer ces crimes
odieux dont mes semblables sont victimes.
Mais comment me taire quand, depuis plus de quinze ans, nous voyons ce
que même un oeil de chirurgien ne peut pas s’habituer à voir ?
Comment me taire quand nous savons que ces crimes contre l’humanité sont
planifiés avec un mobile bassement économique ?
Comment me taire quand ces mêmes raisons économiques ont conduit à
l’usage du viol comme une stratégie de guerre ?
Chaque femme violée, je l’identifie à ma femme ; chaque mère violée à ma
mère et chaque enfant violé à mes enfants.
Comment pouvons-nous nous taire ?
Quel est cet être humain doué de conscience qui se tairait quand on lui
emmène un bébé de six mois dont le vagin a été détruit soit par la pénétration
brutale, soit par des objets contondants, soit par des produits chimiques ?
Déjà un seul cas de viol est grave et nécessite une action de tous. Dans
mon pays, il y a des centaines de milliers de femmes violées et d’autres
milliers d’enfants nés du viol, en plus des millions d’êtres humains morts
suite aux conflits.
Dans le reste du monde, chacun se soulèverait d’indignation ; dans la société
congolaise en perte de repères, les atrocités de masse passent dans l’actualité
comme de simples faits divers, signes désolants d’une société traumatisée par
trop de violence, d’une absence de responsabilité politique et d’une négation
de notre humanité commune.
Monsieur le Président,
Nous avons pris trop de temps et d’énergie à réparer les conséquences
de la violence. Il est temps de s’occuper des causes. Des milliers de
témoignages de victimes montrent que le peuple congolais a soif de justice, de
paix et aspire au changement.
Il y a urgence à agir. Les solutions existent et exigent une réelle
volonté politique.
Nous sommes à un moment critique : l’Accord-Cadre pour la Paix, la
Sécurité et la Coopération, signé à Addis-Abeba en 2013, ne peut rester une
simple feuille de papier. En tant que partenaire historique et premier
contributeur de l’aide, nous appelons l’Union Européenne et ses Etats membres
à revitaliser la mise en oeuvre de cet « Accord de l’Espoir » et d’utiliser
tous les leviers, économiques et financiers mais aussi politiques et
diplomatiques, pour contribuer une fois pour toute à la résolution des
conflits dans les Grands Lacs.
En RDC, la consolidation de l’Etat et le rétablissement de la sécurité à
l’Est constituent la priorité des priorités. La réforme du secteur de la
sécurité est l’une des plus importantes réformes institutionnelles et est au
coeur des efforts de mise en oeuvre de la responsabilité primaire de l’Etat
congolais de protéger les civils.
La justice doit également être placée au coeur du processus de paix et
la lutte contre l’impunité des crimes les plus graves, y compris les crimes de
violence sexuelle, doit être renforcée.
Il n’y aura pas de paix ni de développement économique et social sans
respect des droits de l’homme.
Sans réparation pour les survivantes de viol et les victimes.
Sans assainissement de la fonction publique incluant un vetting des
forces de sécurité. Sans mécanismes d’établissement de la vérité pour
promouvoir la réconciliation.
Monsieur le Président,
Les droits de l’homme constituent non seulement une des valeurs
fondamentales de l’UE mais aussi l’un des objectifs qui inspire ses relations
extérieures, avec la promotion de la paix et du développement et le renforcement
de la démocratie et de l’état de droit.
Et à notre humble estime, il s’agit de la réelle plus-value de l’Union
par rapport à d’autres partenaires internationaux ; mais la realpolitik
illustre bien souvent que les intérêts géostratégiques et économiques priment
sur le respect et la protection des droits de l’homme.
Le projet de règlement européen de la Commission pour un
approvisionnement responsable en minerais, qui doit être examiné devant votre
Assemblée, devrait intégrer une dimension contraignante et viser aussi bien
les produits finis ici en Occident que les matières premières à l’état brut en
Afrique.
Nous exprimons ici le souhait que chacun veille à assurer davantage de
cohérence entre les politiques économiques et le respect des droits de
l’homme, et à placer la dignité humaine au centre des préoccupations
économiques et financières.
Notre pays est plein de potentiel et, avec un commerce plus responsable
et transparent, le Congo a la capacité d’un développement endogène, grâce à
ses ressources naturelles, mais avant tout ses ressources humaines, qui ne
peuvent aujourd’hui être exploitées pour le bénéfice de tous dans un contexte
de « ni paix, ni guerre ».
Monsieur le Président,
Ce prix n’aura de signification pour les femmes victimes de violences
sexuelles que si vous nous accompagnez sur le chemin de la paix, de la
justice et de la démocratie.
Nous le dédions à toutes les survivantes de violences sexuelles, en RDC
et dans le monde entier. Nous sommes convaincus que le changement viendra par
ces femmes courageuses, déterminées et dignes qui sont notre source
d’inspiration au quotidien.
Nous dédions également ce prix à tous les défenseurs des droits de
l’homme qui militent jour après jour, souvent dans des conditions difficiles et
loin des projecteurs, pour favoriser une culture de paix, aider les victimes à
réclamer leurs droits et à rendre leurs institutions plus redevables.
Nous tenons enfin à saluer ici le professionnalisme et le dévouement de
tout le personnel de Panzi ainsi que tous nos partenaires qui ont aidé pour
réaliser notre travail, et je pense particulièrement à l’agence humanitaire
ECHO qui nous soutient depuis 10 ans. Sans vous, nous ne serions pas ici
aujourd’hui.
Ensemble, décideurs politiques, acteurs de la société civile et
citoyens, hommes et femmes, nous devons fixer une ligne rouge contre
l’utilisation du viol comme arme de guerre, et construire un avenir meilleur
pour offrir à nos enfants et à nos petits-enfants un cadre propice à leur
épanouissement, et permettre à tous ceux qui ont trop souffert d’envisager le
futur dans une liberté plus grande.
Monsieur le Président, chers Euro-députés,
Permettez-moi de conclure en m’adressant de votre honorable hémicycle
aux citoyens de mon pays :
Chers compatriotes,
Notre nation, la République Démocratique du Congo, nous appartient.
Ses ressources naturelles et humaines, ses institutions, son destin,
relèvent tous de notre responsabilité.
C’est à nous, le peuple congolais, de façonner nos lois, notre justice
et notre gouvernement, pour servir nos intérêts à tous, et pas seulement ceux
de certains.
Le Prix Sakharov que nous recevons du Parlement Européen est le vôtre,
et il est le symbole de la liberté de pensée. Un droit qui nous a été retiré.
Un droit auquel, suite à la terreur et l’oppression, nous semblons parfois
avoir renoncé.
Ce droit nous est acquis ; et les peuples européens, à travers leurs
représentants, nous tendent aujourd’hui la main pour le recouvrer. Ils veulent
nous appuyer dans notre lutte pour la liberté, la paix, la justice et le progrès.
Aujourd’hui, tout haut, et devant le monde entier, l’Europe nous exprime
sa solidarité.
Elle veut marcher avec nous dans notre quête pour la restauration d’une
vie Congolaise digne.
Unissons-nous et marchons avec elle, afin qu’une fois pour toutes, la
paix et la justice soient restaurées au Congo et que nous puissions aspirer à
un futur meilleur.
Monsieur le Président du Parlement Européen,
Mesdames et Messieurs les Représentants des peuples de l’Union
Européenne,
Distingués invités,
C’est avec beaucoup d’humilité et un grand espoir que je reçois
aujourd’hui le prestigieux Prix Sakharov pour la liberté de l’esprit.
Cette année, vous avez commémoré le centième anniversaire de la première
guerre mondiale. L’Europe pensait que c’était la dernière et que la civilisation
allait triompher. Non hélas, 30 ans plus tard, la folie humaine était de nouveau
au rendez-vous.
Depuis, vous avez fait le choix de la paix et de vivre ensemble, dans
une société orientée vers la liberté et la prospérité.
Dans un contexte sécuritaire de plus en plus instable, où les foyers de
crise se multiplient, notamment dans le voisinage direct de l’Union Européenne
(UE), je tiensavant tout à remercier les élus des peuples européens pour
mettre en lumière les tragédies humaines que vivent les femmes victimes de
viols et de violences sexuelles à l’Est de la République Démocratique du Congo
(RDC).
Dans un monde d’inversion des valeurs où la violence se banalise en
prenant des formes toujours plus abominables, refuser la violence, c’est être
dissident.
En attirant l’attention du monde sur la nécessité de protéger les femmes
en période de conflits armés, vous avez refusé l’indifférence face à l’une des
plus grandes catastrophes humanitaires des temps modernes.
Vous avez réaffirmé que la résolution des conflits dans les Grands Lacs
et la promotion des droits de l’homme et de la démocratie sont et restent des
prioritésde la politique étrangère de l’UE.
Par ce prix, vous avez décidé d’accroître la visibilité du combat mené
par les femmes congolaises depuis plus de 15 ans et de reconnaître leur
souffrance mais aussi leur dignité et le courage qu’elles incarnent.
Monsieur le Président,
La région où je vis est l’une des plus riches de la planète ; pourtant
l’écrasante majorité de ses habitants vivent dans une extrême pauvreté liée à
l’insécurité et à la mauvaise gouvernance.
Le corps des femmes est devenu un véritable champ de bataille, et le
viol est utilisé comme une arme de guerre.
Les conséquences sont multiples et impactent sur l’ensemble de la
société : la cellule familiale est désagrégée, le tissu social détruit,les
populations réduites en esclavage ou acculées à l’exil dans une économie
largement militarisée, où la loides seigneurs de guerrecontinue à s’imposer
en l’absence d’un état de droit. Nous sommes donc face à une stratégie de
guerre redoutablement efficace.
L’autorité de l’Etat congolais et ses institutions restent fragiles,
et ne sont pas encore en mesure ni de protéger la population, ni de satisfaire
à ses besoins de base.
Monsieur le Président,
Rares sont les jours où l’actualité de ma région ne révèle pas un
nouveau drame humain.
La semaine dernière, plus de 50 personnes ont été massacrées à la
machette dans le territoire deBéni au Nord-Kivu : les femmes enceintes sont
éventrées et les bébés mutilés. Dans l’espace d’un mois et demi, 200 personnes
ont été sauvagement tuées.
Comme tout être humain, je voudrais tant ne plus évoquer ces crimes
odieux dont mes semblables sont victimes.
Mais comment me taire quand, depuis plus de quinze ans, nous voyons ce
que même un oeil de chirurgien ne peut pas s’habituer à voir ?
Comment me taire quand nous savons que ces crimes contre l’humanité sont
planifiés avec un mobile bassement économique ?
Comment me taire quand ces mêmes raisons économiques ont conduit à
l’usage du viol comme une stratégie de guerre ?
Chaque femme violée, je l’identifie à ma femme ; chaque mère violée à ma
mère et chaque enfant violé à mes enfants.
Comment pouvons-nous nous taire ?
Quel est cet être humain doué de conscience qui se tairait quand on lui
emmène un bébé de six mois dont le vagin a été détruit soit par la pénétration
brutale, soit par des objets contondants, soit par des produits chimiques?
Déjà un seul cas de viol est grave et nécessite une action de tous. Dans
mon pays, il y a des centaines de milliers de femmes violées et d’autres
milliers d’enfants nés du viol, en plus des millions d’êtres humains morts
suite aux conflits.
Dans le reste du monde, chacun se soulèverait d’indignation ; dans la société
congolaise en perte de repères, les atrocités de masse passent dans l’actualité
comme de simples faits divers, signes désolants d’une société traumatisée par
trop de violence, d’une absence de responsabilité politique et d’une négation
de notre humanité commune.
Monsieur le Président,
Nous avons pris trop de temps et d’énergie à réparer les conséquences
de la violence. Il est temps de s’occuper des causes. Des milliers de
témoignages de victimes montrent que le peuple congolais a soif de justice, de
paix et aspire au changement.
Il y urgence à agir. Les solutions existent et exigent une réelle
volonté politique.
Nous sommes à un moment critique : l’Accord-Cadre pour la Paix, la
Sécurité et la Coopération, signé à AddisAbeba en 2013, ne peut rester une
simple feuille de papier. En tant que partenaire historique et premier
contributeur de l’aide, nous appelons l’Union Européenne et ses Etats membres
à revitaliser la mise en oeuvre de cet « Accord de l’Espoir » et d’utiliser
tous les leviers, économiques et financiers mais aussi politiques et
diplomatiques, pour contribuer une fois pour toute à la résolution des
conflits dans les Grands Lacs.
En RDC, la consolidation de l’Etat et le rétablissement de la sécurité à
l’Est constituent la priorité des priorités. La réforme du secteur de la
sécurité est l’une des plus importantes réformes institutionnelles et est au
coeur des efforts de mise en oeuvre de la responsabilité primaire de l’Etat
congolais de protéger les civils.
La justice doit également être placée au coeur du processus de paix et
la lutte contre l’impunité des crimes les plus graves, y compris les crimes de
violence sexuelle, doit être renforcée.
Il n’y aura pas de paix ni de développement économique et social sans
respect des droits de l’homme.
Sans réparation pour les survivantes de viol et les victimes.
Sans assainissement de la fonction publique incluant un vetting des
forces de sécurité. Sans mécanismes d’établissement de la vérité pour promouvoir
la réconciliation.
Monsieur le Président,
Les droits de l’homme constituent non seulement une des valeurs
fondamentales de l’UE mais aussi l’un des objectifs qui inspire ses relations
extérieures, avec la promotion de la paix et du développement et le renforcement
de la démocratie et de l’état de droit.
Et à notre humble estime, il s’agit de la réelle plus-value de l’Union
par rapport à d’autres partenaires internationaux ; mais la realpolitik
illustre bien souvent que les intérêts géostratégiques et économiques priment
sur le respect et la protection des droits de l’homme.
Le projet de règlement européen de la Commission pour un
approvisionnement responsable en minerais, qui doit être examiné devant votre
Assemblée, devrait intégrer une dimension contraignante et viser aussi bien
les produits finis ici en Occident que les matières premières à l’état brut en
Afrique.
Nous exprimons ici le souhait que chacun veille à assurer davantage de
cohérence entre les politiques économiques et le respect des droits de
l’homme, et à placer la dignité humaine au centre des préoccupations
économiques et financières.
Notre pays est plein de potentiel et, avec un commerce plus responsable
et transparent, le Congo a la capacité d’un développement endogène, grâce à
ses ressources naturelles, mais avant tout ses ressources humaines, qui ne
peuvent aujourd’hui être exploitées pour le bénéfice de tous dans un contexte
de « ni paix, ni guerre ».
Monsieur le Président,
Ce prix n’aura de signification pour les femmes victimes de violences
sexuelles que si vous nous accompagnez sur le chemin de la paix, de la
justice et de la démocratie.
Nous le dédions à toutes les survivantes de violences sexuelles, en RDC
et dans le monde entier. Nous sommes convaincus que le changement viendra par
ces femmes courageuses, déterminées et dignes qui sont notre source
d’inspiration au quotidien.
Nous dédions également ce prix à tous les défenseurs des droits de
l’homme qui militent jour après jour, souvent dans des conditions difficiles et
loin des projecteurs, pour favoriser une culture de paix, aider les victimes à
réclamer leurs droits et à rendre leurs institutions plus redevables.
Nous tenons enfin à saluer ici le professionnalisme et le dévouement de
tout le personnel de Panzi ainsi que tous nos partenaires qui ont aidé pour
réaliser notre travail, et je pense particulièrement à l’agence humanitaire
ECHO qui nous soutient depuis 10 ans. Sans vous, nous ne serions pas ici
aujourd’hui.
Ensemble, décideurs politiques, acteurs de la société civile et
citoyens, hommes et femmes, nous devons fixer une ligne rouge contre
l’utilisation du viol comme arme de guerre, et construire un avenir meilleur
pour offrir à nos enfants et à nos petits-enfants un cadre propice à leur
épanouissement, et permettre à tous ceux qui ont trop souffert d’envisager le
futur dans une liberté plus grande.
Monsieur le Président, chers Euro-députés,
Permettez-moi de conclure en m’adressant de votre honorable hémicycle
aux citoyens de mon pays :
Chers compatriotes,
Notre nation, la République Démocratique du Congo, nous appartient.
Ses ressources naturelles et humaines, ses institutions, son destin,
relèvent tous de notre responsabilité.
C’est à nous, le peuple congolais, de façonner nos lois, notre justice
et notre gouvernement, pour servir nos intérêts à tous, et pas seulement ceux
de certains.
Le Prix Sakharov que nous recevons du Parlement Européen est le vôtre,
et il est le symbole de la liberté de pensée. Un droit qui nous a été retiré. Un
droit auquel, suite à la terreur et l’oppression, nous semblons parfois avoir
renoncé.
Ce droit nous est acquis ; et les peuples européens, à travers leurs
représentants, nous tendent aujourd’hui la main pour le recouvrer. Ils veulent
nous appuyer dans notre lutte pour la liberté, la paix, la justice et le progrès.
Aujourd’hui, tout haut, et devant le monde entier, l’Europe nous exprime
sa solidarité.
Elle veut marcher avec nous dans notre quête pour la restauration d’une
vie Congolaise digne.
Unissons-nous et marchons avec elle, afin qu’une fois pour toutes, la
paix et la justice soient restaurées au Congo et que nous puissions aspirer à
un futur meilleur.
Notre pays est malade mais, ensemble, avec nos amis de par le monde,
nous pouvons et nous allons le soigner.
Je vous remercie.
Dr Denis
Mukwege
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